BD, Tome IV, Concessions de bancs dans l’ancienne église de la Madeleine à Montbrison. Communications de MM. Alph. de Saint-Pulgent et T. Rochigneux., pages 307 à 313, Montbrison, 1887.

 

Concessions de bancs dans l’ancienne église de la Madeleine à Montbrison. Communications de MM. Alph. de Saint-Pulgent et T. Rochigneux.

 

M. de Saint-Pulgent donne communication de trois pièces qu’il pense devoir présenter quelque intérêt à raison de l’édifice auquel elles se rapportent. Ce sont trois actes portant concession de bancs dans l’église paroissiale de la Madeleine de Montbrison, monument dont il ne reste ni vestiges ni souvenirs propres à en déterminer exactement la forme et l’importance, bien que sa disparition remonte à une époque relativement récente.

Le premier de ces actes est de l’année 1663. En voici la partie principale :

« Par devant le notaire royal au bailliage de Forest soubsigné, et présant (sic ) les tesmoins soubsnommés, furent présans Claude Chappuis, escuyer seigneur de la Goutte, conseiller du Roy magistrat au dit siège, et Mathieu Grillier, dict Fontaine, marchand de la dicte ville, marguilliers de l’esglize parrochalle de Ste Marie Magdelaine d’Icelle ville, lesquels de leur gré, audict nom, et de l’advis de vénérable messire Jean Puy, prêtre, bachellier en Ste Théologie de la faculté de Paris, curé de la dicte esglize, et en considération du don nouvellement faict à icelle par François du Rozier, escuyer, sieur de Thaix, conseiller du Roy, lieutenant particullier assesseur en l’eslection dudict pays, du devant ou parement d’autel et assortiment des deux autelets (1), du principal ornement faict de nouveau, en ladicte esglize, d’une moere à fonds blanc, semée de grandes fleurs couleur incarnadin, garny d’un grand passement d’or, ont audict sieur du Rozier, présant et acceptant, conceddé, et aux siens, le pouvoir et faculté de mettre et poser un banc, pour assister par luy et sa famille aux offices de ladicte esglize, dans la nef d’icelle, à costé de l’autel de la Ste Vierge et au devant de la chaize à prêcher attachée au balustre séparant le chœur de ladicte nef (2), de mesme grandeur et largeur que les autres qui sont en ladicte esglize…… »

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(1) Ces autelets sont probablement deux crédences accompagnant de part et d’autre l’autel. Une disposition semblable se remarque dans l’église de Rochefort, commune de Saint-Laurent-Rochefort ; le devant de ces crédences latérales y est garni d’un parement en cuir de Cordoue assorti à celui de l’autel. Ce dernier est daté de l’an séculaire 1700. Cf. Bulletin de la Diana, t. III, p. 52 (V.D.)
(2) Cette particularité d’une chaire à prêcher faisant corps avec la table de communion se rencontre ailleurs en Forez. Il en existe un bel exemple à Palognieu. Dans ce cas, la chaire n’est pas élevée au dessus du sol, mais est au niveau des stalles du chœur. (V.D.)

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L’acte fut reçu par Chassain, notaire royal.

Le second acte de concession, en date du 12 avril 1753, reçu par le notaire Bochetal, fut consenti par « Messire Jérôme Benoît, docteur en théologie et curé de l’église paroissialle de Ste-Magdelaine de cette ville, et Gabriel Duguet, ecuyer, chevallier de l’ordre royal:militaire de St-Louis, ancien capitaine au régiment d’Auvergne, marguillier d’honneur de l’œuvre de fabrique de ladite église, lesquels ayant pris lecture d’un acte du deux avril mil six cent soixante-trois….., voulant continuer de donner à la famille dudict du Rozier de Magnieu des marques de leur gratitude…., ils ont déclaré qu’ils consentent à ce que ledict seigneur Henry du Rosier de Magnieu, ici présent et acceptant, jouisse pour luy et les siens du même droit de banc accordé à son dit bisayeul, lequel se trouve au premier rang du côté de l’Epître comme il étoit avant le changement de la balustrade de ladite église, lequel se trouve maintenant placé devant l’autel de Ste Reyne…. »

Cette concession, ainsi que celle de 1663, était gratuite, mais, « par ces mêmes présentes, le dit seigneur Henry du Rosier de Magnieu a reconnu comme il reconnoît de nouveau au profit desdits sieurs curé. et marguillier de la dite église la pension annuelle de vingt sols, à cause de la jouissance qu’a ledit seigneur de Magnieu d’un autre banc dans ladite église de Ste-Magdelaine et sous la grande chaire, posé. au premier pillier en entrant, à gauche de la chapelle de St-Martin, lequel banc fut anciennement des Dubesset…. »

Il ressort de ces deux pièces, ainsi que de celle dont il sera parlé tout à la l’heure, que l’église n’avait qu’une nef, mais renfermait plusieurs autels, puisqu’en dehors des deux autelets mentionnés à l’acte de 1663, nous voyons qu’il est question de l’autel de la Ste-Vierge, de celui de Ste-Reyne et de celui de St-Martin. D’autre part, des remaniements avaient dû être faits dans l’intérieur de l’édifice, puisque l’acte de 1755 parle du changement de la balustrade de l’église. Il serait évidemment intéressant de savoir pour quels motifs et dans quel sens ces modifications avaient été opérées pendant ce long espace de 90 années ; malheureusement M. de Saint-Pulgent n’a pu trouver aucune autre pièce relative à cette période.

La troisième concession, reçue par devant le notaire royal Bourboulon, le 6 avril 1784, était consentie par « Mre Gérôme Benoît, docteur en théologie, prêtre et curé de l’église paroissiale Ste-Marie-Magdelaine, archiprêtre substitué, et ce noble Jacques-François Gèrentet, conseiller du roi, président en l’élection de la ditte ville de Montbrison, y demeurant, marguillier d’honneur de la ditte paroisse de la Magdelaine, lesquels…. ont par ces présentes cédé, quitté, remis et concédé, avec promesse de maintenue et garantie, à noble Jean-Marie Salles, avocat en Parlement, conseiller du roi, juge royal, capitaine chatelain aux châtellenies royales de Marcilly et Châtelneuf, exercées à Montbrison, y demeurant…., l’emplacement d’un banc dans la nef de la ditte église paroissiale de la Magdelaine de cette ville, du côté gauche en entrant, entre celui de Louis-François Puy de la Bâtie, écuyer, et celui de monsieur Descombes, élu en l’élection de cette ville…. La présente concession faite et consentie d’abord pour et moyennant le prix et somme de douze livres pour introge, une fois payées ….. ; en second lieu, pour et moyennant la pension annuelle et perpétuelle de quarante sols….. »

Ce document ne renferme aucune donnée nouvelle sur l’édifice même de la Madeleine, mais il a paru intéressant de le signaler à cause des renseignements qu’il renferme sur le prix de location des bancs au siècle dernier. Leur valeur avait doublé en 20 années, et le prix devait en paraître déjà bien élevé ; mais que diraient nos ancêtres de ce temps, s’ils voyaient, dans de simples églises de village, ces mêmes locations atteindre aujourd’hui le chiffre exorbitant de trente francs !

A la suite de cette communication, une discussion s’engage entre plusieurs membres relativement à l’emplacement précis de l’église de la Madeleine, démolie pendant la Révolution. M. Rochigneux dit qu’il a pu, à ce sujet, obtenir récemment quelques renseignements de diverses personnes, entr’autres de deux vieillards presque nonagénaires, le sieur Claude Couterate et la veuve Palluy, fils et fille du dernier sonneur-fossoyeur de la paroisse.

L’église s’élevait à l’est de la rue de la Madeleine et joignait au sud la rue actuelle de Saint-Antoine sur laquelle elle débordait, parait-il, et aurait eu sa principale porte ; du côté nord, elle occupait la majeure partie du terrain compris entre cette dernière rue et le ruisseau encaissé dit la Goutte du Chemin-Rouge, à quelques mètres de son confluent avec le ruisseau de Furan. Dans cet espace, le sieur Jean Bouchot trouva en effet, il y a moins de quinze années, en construisant la grange qui forme avec sa maison le n° 5 de la rue de Saint-Antoine, des vestiges assez considérables et fort solides des anciennes fondations de l’église, et aussi de nombreux ossements provenant d’un caveau intérieur.

Toutefois, M.Rochigneux n’a pu recueillir aucune indication verbale certaine relativement à l’orientation (1) et à la disposition de l’édifice qui était, de deux côtés, entouré d’un cimetière (2) séparé à l’est, par un simple mur de clôture, des bâtiments ou dépendances de l’ancienne commanderie et chapelle de Saint-Antoine.

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(1) La faible largeur (28 mètres) comprise entre la rue de saint-Antoine, au sud, et le bord du ruisseau au nord, ne permet pas de douterque l’église fût régulièrement orientée.
(2) Il existe encore un caveau de cet ancien cimetière ; il est enfoui dans le jardin du sieur Barthelemy Perrin, situé derrière sa maison portant le n°28 de la rue de la Madeleine.

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Réputée la plus ancienne de Montbrison (3), mais n’ayant jamais été comprise dans l’agglomération urbaine, l’église de la Madeleine où le roi Louis VII (4), de passage dans notre ville, rendit , en 1162, une sentence entre Guichard, abbé de Savigny, et Guy II de Forez, dut être à l’origine et resta sans doute pendant longtemps un édifice peu considérable. Il est à présumer, comme le fait remarquer M. de Saint-Pulgent, qu’elle se composa d’abord d’une nef unique, vraisemblablement romane ; elle ne dut commencer à s’agrandir, par l’adjonction graduelle de chapelles latérales, qu’à partir du milieu du XVe siècle. Quelques rares débris provenant de sa démolition semblent venir à l’appui de cette hypothèse. On voit, en effet, sur un pan de mur au nord-est du cimetière actuel, une base de pilier, en granit, ornée de moulures prismatiques, et dans la rue même de la Madeleine, à quelquespas de l’emplacement du vieil édifice, un tronçon, en grès houiller, d’un autre pilier cantonné d’une grosse colonne engagée.

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(3) Bernard (Auguste). Histoire du Forez, tome I, page 157.
(4) Cartulaire de Savigny, introduction, page XCIII : « In MonteBrisonis, in ecclesia Sanctae Mariae Magdalenae, extra villam, ubi rex missam audivit ». Lors de la construction de l’enceinte fortifiée de Montbrison en 1428, l’église et le faubourg de la Madeleine furent laissés en dehors des murs.

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Le plus notable agrandissement ne date que de 1750 (1). Il ne reste de cette adjonction nouvelle qu’un chapiteau de pilastre dorique à cannelures, égalemnt en grès de Saint-Etienne, qui a dû appartenir à un retable ou plutôt à un portail ; il est placé, en guise de siège rustique, au devant d’une maison de la rue de la madeleine.

Il est vivement à désirer, à défaut d’indices matériels plus important, que les archives publiques et particulières de notre ville livrent à l’inquisition des archéologues de nouveaux documents. En attendant, les renseignements tirés des papiers personnels de M. de Saint-Pulgent sont un jalon précieux pour l’histoire et l’étude d’un monument sur la disposition et l’architecture duquel on n’avait jusqu’à ce jour aucune donnée positive.

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(1) Almanach de la ville de Lyon, années 1759 et 1760 (Description des villes, bourgs, villages, etc., des provinces de Lyonnois, Forez et Beaujolois, par Mathon de la Cour), page 129. D’après le même auteur, l’église était primitivement dédiée à saint Etienne ; elle n’aurait été mise sous le vocable de sainte Madeleine qu’au quatorzième siècle. Toutefois il résulterait d’un acte reproduit dans la Notice sur saint Aubrin, 1868, in-32, sans nom d’auteur, qu’elle portait en 1666 ce double vocable.
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