BD, Tome IV, Procès-verbal de la réunion du 4 août 1887, pages 199 à 214, Montbrison, 1887.

 

JUILLET – JANVIER 1888.

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BULLETIN DE LA DIANA

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I.

Procès-verbal de la réunion du 4 août 1887.

 

PRESIDENCE DE M. TESTENOIRE-LAFAYETTE.

La séance est ouverte à deux heures.

Sont présents : MM. M. de Boissieu, Boulin, Brassart, Durand, abbé Faury, Gonnard, Jordan de Sury, Joulin, Lafay, Maillon, O. Puy de la Bastie, T. Rochigneux, J. Rony, L. Rony, baron de Rostaing, A. Roux, Testenoire – Lafayette, Thevenet, Thiollier.

MM. Jeannez et W. Poidebard ont écrit pour s’excuser de ne pouvoir assister à la séance.

Généalogie des seigneurs de Saint-Chamond, par l’abbé Royer, publiée par M. Maurice de Boissieu. – Histoire de la ville de Saint-Cbamond, par M. le chanoine Condamin.

M. le Président annonce que l’impression du IXe volume des Mémoires est assez avancée pour qu’on en puisse espérer la distribution vers la fin de l’année. Ce volume sera rempli on grande partie par la Généalogie des seigneurs de Saint-Chamond, travail resté manuscrit de l’abbé Pierre-Augustin Royer, qui vivait au dernier siècle. M. Maurice de Boissieu, qui s’est chargé de l’éditer, y a ajouté de nombreuses notes et des pièces justificatives très importantes et presque toutes inédites, réunies au cours de recherches qui n’ont pas duré moins de dix ans. Au nombre de ces pièces, il faut mentionner tout spécialement un vidimus ancien de la charte communale de Saint-Chamond ; ce vidimus sera reproduit en héliogravure.

L’histoire de Saint-Chamond a la bonne fortune d’exercer en ce moment la plume d’un autre de nos confrères, M. le chanoine James Condamin. Cet infatigable travailleur met dès aujourd’hui son livre en souscription au prix de 20 francs et en annonce l’apparition en 1888.

M. Maurice de Boissieu fait observer que l’ouvrage qui s’imprime actuellement dans les Mémoires de la Diana est simplement l’histoire des seigneurs de Saint-Chamond et non celle de la ville.

Archives du château de Genetines.

M. le Président dit que M. le comte de Sugny a remis aux représentants de la Société les archives du château de Genetines, offertes par lui à la Diana. MM. O. de Viry et E. Brassart se sont chargés d’en dresser l’inventaire.

M. Vincent Durand dit qu’il a pu admirer dans un rapide examen la richesse de ce fonds ; il croit qu’il y aura lieu do ne pas en publier l’inventaire dans le bulletin, mais d’en faire l’objet d’une publication à part, qui serait la tète d’une nouvelle série consacrée à l’analyse raisonnée des archives de la Société.

Statue équestre d’Usson. Communication de MM. Vincent Durand et Brassart.

M. Vincent Durand, au nom de M. Brassart et au sien, fait la communication suivante :

Depuis notre dernière réunion, le musée de la Diana s’est enrichi d’une pièce intéressante, très gracieusement cédée par M. l’abbé Marey, d’Usson, à la demande de notre excellent confrère M. l’abbé Langlois, archiprêtre de Saint-Bonnet-le-Château.

Il s’agit d’un fragment de statue équestre retiré jadis, comme nous l’apprend le conseiller Moissonnier, des fondations de la clôture d’un jardin appartenant au juge d’Usson, à une époque que ce savant ne précise point, mais qui doit être antérieure ou postérieure de peu à l’an 1700(1). Longtemps placé sur le couronnement d’une muraille, au bord d’un chemin, il était désigné à Usson sous un nom passablement rabelaisien, qu’il devait à une mortaise pratiquée dans la croupe du cheval pour recevoir la queue, formée d’une pièce de rapport aujourd’hui perdue. Depuis quelques années, M. l’abbé Marey l’avait fait transporter dans sa cour, où il servait à supporter un pilier en bois d’un appentis.

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(1) Mémoires de la Diana, t. VII, p. 229.

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Cette sculpture répond encore à la description qu’en faisait le conseiller Moissonnier : « Par l’injure des temps, il n’y reste que le corps du cheval, dont la queue était postiche, et le cavalier, vêtu à la romaine, y parait seulement depuis la ceinture jusqu’aux pieds. L’on n’a pas encore recouvré les autres fragments, ni l’inscription qui devait l’accompagner. »

Il faut ajouter que le cavalier était revêtu d’une cuirasse, avec lambrequins de cuir disposés sur deux étages et descendant un peu au dessus du genou. Le buste a disparu, sans qu’on puisse décider s’il était taillé dans un bloc à part. Les pieds du cavalier; la tête, les pieds et la queue du cheval manquent aussi. On distingue sur le poitrail de ce dernier des traces de harnachement.

La pierre est un granit gris. La longueur actuelle est de 1m 14 ; la hauteur de 0m 52. On peut estimer que, dans son intégrité, la statue devait mesurer environ 1m 70 de longueur, sur une hauteur à peu près égale.

Le travail est d’une basse époque, sommaire, sans toutefois être d’une mauvaise main.

Il est bien regrettable que ce morceau nous soit parvenu dans un état de mutilation aussi avancé. Cette circonstance commande naturellement une certaine réserve dans les hypothèses qu’on peut faire sur le sujet représenté. Il en est une toutefois, émise par M. Aug. Chaverondier, qui parait singulièrement vraisemblable. D’après le savant archiviste de la Loire, la statue équestre d’Usson pourrait bien avoir appartenu à un de ces groupes composés d’un cavalier terrassant un monstre anguipède signalés sur divers points de la Gaule et dont le célèbre monument de Merten, découvert en 1878, près de Metz; est un des exemples les plus connus. Je citerai aussi, pour sa bonne conservation et parce qu’il a été trouvé dans le voisinage immédiat du Forez, le groupe équestre de la Jonchère, près Billom, dont ses inventeurs firent l’objet d’une exhibition foraine, et que plusieurs d’entre nous peuvent se rappeler d’avoir vu pour quelques sous, Il y a une vingtaine d’années, sur la place de la Grenette à Montbrison, pendant la tenue de je ne sais plus quel concours agricole ou autre solennité publique.

J’ai eu récemment occasion de revoir, en compagnie de nos confrères MM. Guillemot et Brassart, ce groupe de la Jonchère, qui est resté en possession des personnes qui l’ont découvert, commune d’Egliseneuve de Billom (Puy-de-Dôme), et j’ai retrouvé parmi des fragments recueillis par elles au moment de la trouvaille, une tète de serpent qui, sans nul doute, terminait un des membres inférieurs, aujourd’hui brisés, du personnage terrassé. Ainsi se trouve confirmée l’opinion de M. Prost qui, citant le groupe de la Jonchère, dans une étude sur le monument de Merten présentée à la Société des Antiquaires de France (1), n’a pas hésité à reconnaître un monstre anguipède dans le personnage en question. On nous a exhibé aussi, comme découvert avec la statue, un petit glaive de métal, très court et peut-être réduit de longueur par l’oxydation, dont aurait été armée, ce semble, la main droite du cavalier, qui est levée dans l’acte de frapper. Je ne sache pas que ce glaive ait été signalé jusqu’ici, non plus que la tète de serpent (2).

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(1) Bulletin de la Société des Antiquaires de France, année 1879, p. 62 et suivantes.
(2) Ces détails sont notamment passés sous silence par M. Em.. Thibaud dans le rapport, accompagné de dessins, sur la découverte de la Jonchère, publié dans le Bulletin du Comité historique des arts et monuments, t. II, 1850, p. 30.

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Une chose nous a paru bien digne de remarque dans le groupe de la Jonchère : c’est l’état d’intégrité absolue de la tête du cavalier. L’exécution défectueuse ou la mauvaise conservation de la tète, dans la plupart des statues similaires, n’ont pas permis jusqu’à présent de déterminer avec certitude l’empereur ou les empereurs dont elles devaient perpétuer les triomphes, étant admis que ce sont des portraits et non point, comme le pensent quelques-uns (1), une personnification de la puissance romaine écrasant la rébellion. Il ne nous parait donc pas sans intérêt de vous soumettre une photographie de la tète du cavalier de la Jonchère, dont le travail, relativement bon, offre quelques garanties de ressemblance. Si la comparaison de cette tête avec les types fournis par d’autres sculptures et par la numismatique autorisait à y voir le portrait d’un empereur donné, on pourrait peut-être en tirer quelque induction applicable à la statue équestre d’Usson, érigée aussi sur l’ancien territoire arverne, d’une exécution moins bonne que celle de la Jonchère, mais que pourtant certaines analogies de style peuvent sans invraisemblance faire rapporter à la même époque.

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(1) Voir notamment, dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de France, 1886, p. 143, la communication de M. Prost sur le groupe équestre d’Heddernheim, près Francfort, découvert en 1884. Ce groupe, élevé sur une colonne analogue à celle de Merten, était accornpagné d’une inscription dédicatoire à Jupiter et à Junon Régina, sous la date de 240. Malheureusement, cette inscription rappelle, non l’érection primitive du monument, mais une restitution.

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Excursion en 1887.

M. le président fait connaître que la commission chargée de l’excursion dont Essalois doit être le centre a décidé qu’elle comprendrait aussi la visite de Chambles et de Notre-Dame de Grâces. Le jour de l’excursion est fixé au 23 août, le rendez-vous général à Bonson à sept heures cinquante du matin. Le programme et le questionnaire seront envoyés incessamment.

Acquisition d’antiquités découvertes à Moind.

M. le Président dit que la Société a pu, par l’entremise de M. Philippe Testenoire, acquérir de M. Vissaguet le vase de bronze ayant contenu le trésor découvert à Moind l’an passé (1), ainsi que quinze des monnaies qu’il contenait et une pierre gravée antique trouvée dans le même champ.

A ce propos, M. le Président ajoute que l’insurrection ou l’invasion, cause de cette cachette, avait dû s’étendre à une bonne pai4ie de la Gaule : car il a eu l’occasion d’assister, il y a quelques années, à la découverte faite sur l’emplacement de l’antique Cemenelium, aujourd’hui Cimiez (Alpes-Maritimes), d’un trésor dont la composition était semblable à celle du trésor de Moind.

M. Brassart rappelle que M. d’Aigueperse (2) a constaté qu’aucune monnaie postérieure à 260 n7a été trouvée sur l’emplacement du Ludna de la carte de Peutinger, station détruite et anéantie par un fait de guerre et dont les vestiges ont revu le jour en 1853.

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(1) Bulletin de la Diana, t. III, page 308.
(2) D’Aigueperse. OEuvres archéologiques et littéraires, T. I, pages 71, 96 et 97.

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Découvertes au pied du mont d’Isoure. Communication de M. Thevenet.

M. Thevenet dépose sur le bureau et offre à la Société divers objets et poteries antiques recueillis par lui au mont d’Isoure, et donne à ce sujet les explications suivantes :

J’ai l’honneur de vous soumettre le compte-rendu succinct de découvertes que j’ai récemment faites au mont d’lsoure, sur le territoire de la commune de Chalain, et qui peuvent présenter quelque intérêt au point de vue historique et archéologique.

Le 17 mai dernier, me trouvant au bourg de Chalain d’lsoure, j’appris qu’un cultivateur de cette commune, M. Charles (Jean), avait mis au jour des substructions antiques et recueilli divers objets, en pratiquant des travaux de minage dans sa propriété sise au lieu dit, la Pierre murée, sur le versant occidental du Mont-d’1soure et à 900 mètres au nord du bourg de Chalain.

Je me rendis immédiatement chez M. Charles, qui s’empressa de me montrer les objets qu’il avait découverts et dont voici la description :

Céramique. 1° Une soucoupe samienne, d’un rouge corail et de forme élégante; mais non estampillée (à peu près intacte).

2° Une lampe entière, type romain des trois premiers siècles de notre ère. – Cette lampe, fort bien conservée, est en terre fine, jaunâtre, et recouverte d’une couche de vernis destinée, sans doute, à empêcher le suintement de l’huile; elle se compose d’un récipient fermé, de forme circulaire, et d’un bec pour recevoir la mèche. La partie supérieure est concave et présente un médaillon central, portant, en relief, un Adonis ou un génie aîlé. (Diamètre moyen, 0m 062; hauteur totale, 0m 024).

3° Une statuette, en terre blanche, assez lourde, amputée des bras, et des jambes à la hauteur des genoux. Tête d’un assez bon style, profil grec, cou développé, chevelure ondulée, rattachée au tronc par une décoration végétale. La longueur du buste parait un peu exagérée ; une des jambes amputées, la droite, devait être dans une position allongée, tandis que la partie inférieure de l’autre était, je crois, ployée et ramenée sous la cuisse.

La hauteur de la statuette, en l’état actuel, est de 0m 13.

Monnaies, médailles et autres objets métalliques.

– Quelques pièces de monnaie ont été trouvées par M. Charles dans le terrain défoncé par lui ou à proximité. Il y a :

1 denier d’argent, petit module, à l’effigie de IVLIA MAMAEA (vers l’an 225 de notre ère). Au revers, Junon assise. Conservation parfaite.

4 monnaies bronze, frustes.

1 fragment d’agrafe ou de fibule.

1 médaille ovale, laiton. Figure de roi couronné, buste de femme au revers.

2 petits objets en bronze (un pommeau et un pied de flambeau ?)

Ces trois derniers objets ne paraissent pas devoir remonter à une époque antérieure au XIV e ou XVe siècle.

En présence de ces divers objets, que je considérais comme une intéressante trouvaille archéologique, et désireux de pratiquer moi-même des recherches, je me fis conduire sur l’emplacement des découvertes faites par M. Charles. Là, dans une vigne nouvellement plantée, je pus opérer de nouvelles fouilles avec succès.

J’ai découvert et recueilli :

Un fragment de lampe en terre cuite: cerf lancé dans un médaillon.

Plusieurs débris de coupes, tasses, plats, ornés de reliefs décoratifs, tels que guirlandes de feuillage, ornements à la barbotine, dans le genre des vases d’Arezzo et de Lezoux.

Un fragment d’amphore en terre blanche.

Quantité de verroteries de diverses nuances, dont un morceau d’un très-joli bleu.

Des clous en fer fin, à tige carrée et à tête plate.

Une portion d’étui en os ; des ossements calcinés.

De menues parcelles de cuivre fondu.

Un bloc de béton aggloméré, composé de chaux, cailloux, débris de poterie, et recouvert d’un enduit lisse, coloré en rouge foncé et vert olive.

Tous ces débris ou résidus ayant subi l’action d’un feu violent, à en juger par leur calcination ou leur déformation, et le terrain qui les recouvrait étant lui-même, dans cette partie, sur une surface de 12 à 15 mètres carrés, d’un aspect noir et charbonneux, j’ai supposé que j’étais sur l’emplacement d’une construction romaine détruite par un incendie. Ce doute s’est changé en certitude, lorsque M. Charles m’a fait connaître qu’en opérant le minage de sa vigne il avait, dans cet endroit précis, mis à jour, à une profondeur de quatre pieds environ, des substructions en maçonnerie ayant la forme d’an carré parfait de douze mètres de côté, enveloppant un autre carré de six mètres de côté seulement : ce qui lui faisait dire qu’ « il y avait deux maisons l’une dans l’autre. »

Ces renseignements m’ont paru d’autant plus précieux, que M. Charles étant absolument étranger aux règles de l’art de bâtir chez les Romains, son imagination ne pouvait se livrer à des fantaisies conventionnelles. Ils ont du reste été corroborés par un propriétaire voisin, M. Delage, en présence de notre confrère M. Rochigneux, qui a bien voulu m’accompagner dans une seconde excursion au mont d’lsoure.

de l’édifice par lui découvert. Je mets sous vos yeux ce plan et celui des lieux environnants. A l’aide d’un croquis très compréhensible fait par M. Charles au moment où il a fait exécuter son minage, et conservé par lui sur un cahier lui servant de livre do comptes, j’ai pu reconstituer le tracé géométrique à peu près exact des fondations.

La double enceinte quadrangulaire représentée sur le plan dessine bien le cadre d’une maison romaine. Toutefois, à raison même de l’exiguïté de l’édicule, et aussi à cause des ressauts extérieurs servant de base à des colonnes ou à des pilastres, une autre hypothèse est peut-être préférable. Ne se trouverait-on pas en présence des ruines d’une chapelle ou d’un petit temple romain ; et alors la statuette trouvée en cet endroit ne représenterait-elle pas une divinité en l’honneur de laquelle le temple aurait été édifié ?

Avant de terminer, il me parait utile de vous donner quelques détails sur la nature des matériaux employés dans la construction. Le massif des maçonneries ordinaires composant les fondations était en basalte brut du mont d’Isoure, tandis que les angles et les assises des piliers intermédiaires étaient formés de moëllons de moyen appareil ; les parements vus compris entre les angles et les piliers étaient de très petit appareil, mais les joints verticaux et horizontaux étaient parfaitement dressés. Ces divers moëllons, en granit porphyroîde grossier, dont le similaire ne m’a pas paru exister au mont d’Isoure, doivent provenir des montagnes situées au nord-ouest de Chalain, où cette qualité de pierre abonde.

Plusieurs spécimens des moëllons provenant des substructions que je viens de décrire ont été employés pour servir d’enchant à la maison d’habitation que M. Charles a récemment construite pour son usage. Le palier pavé que l’on remarque au-devant de la porte d’entrée est uniquement composé de moëllons de petit appareil ramassés dans les mêmes substructions.

Enfin, la découverte de la soucoupe et de la monnaie d’argent du règne de lVLIA MAMAEA, dans l’espace de terrain servant de cour à M. Charles, me permet de supposer qu’il y a eu d’autres habitations romaines dans cette partie de la montagne, admirablement située du reste sous le rapport de l’exposition et de la défense.

De ce point, placé à 430 mètres d’altitude, à proximité d’un plateau et d’un col facile à franchir pour communiquer avec le versant exposé au levant, la vue s’étend sur un vaste horizon comprenant la partie occidentale de la plaine du Forez, limitée par les monts d’Auvergne.

Il est probable que des fouilles bien ordonnées au mont d’lsoure amèneraient de nombreuses découvertes.

D’un autre côté, les travaux d’achèvement du canal du Forez qui seront entrepris sous peu, sur le versant Est de la montagne, faciliteront admirablement ces recherches, toujours intéressantes pour l’histoire et l’archéologie de notre pays.

M. le Président félicite M. Thevenet de sa très curieuse communication et le remercie, au nom de la Société, du don qu’il veut bien faire au musée de la Diana de la statuette et de la plupart des objets par lui décrits.

Véritable chiffre inscrit sur la Table de Peutinger en regard de l’étape de Foro Segustavarum à Mediolano. Communication de M. Vincent Durand et de M. le baron de Rostaing.

M. Vincent Durand s’exprime ainsi :

Le numéro d’avril 1887 de l’Ancien Forez, publié par M. Révérend du Mesnil, contient un article où notre confrère soumet à un nouvel examen la partie de la Table de Peutinger concernant la région lyonnaise et forézienne. Il y reprend le chiffre VIIII comme exprimant la distance de Foro Segustavarum à Mediolano. Il va même plus loin : sous prétexte que cette étape n’est accompagnée d’aucune cote sur les gravures de la Table publiées par Bergier et par M. A. Maury, il laisse supposer qu’il en est de même sur le document original, et que le cbiffre vu par les autres éditeurs ne fait qu’un avec le chiffre VIIII placé au dessous, lequel s’applique à la distance de Foro Segustavarum à Aquis Segete.

Il s’agit ici d’un fait matériel, indépendant de tout système, mais qu’il importe de mettre hors de doute, car il sert de point de départ aux identifications, bonnes ou mauvaises, que la discussion de la Table peut suggérer.

Toutes les anciennes éditions de la Table, sauf les cuivres de Bruxelles de 1728, assignent le chiffre XIIII à l’étape de Foro Segustavarum à Mediolano. En 1864, M. Alfred Maury et, après lui, M. Ernest Desjardins en 1869, crurent lire VIIII, au lieu do XIIII, sur le parchemin original, et ils introduisirent ce chiffre, l’un, dans sa Note sur un nouvel examen de la table de Peutinger, l’autre, dans la belle édition qu’il a donnée de ce précieux monument. Telle paraissait donc être la bonne leçon en 1872, au moment où je fis une nouvelle tentative pour identifier le site de Médiolanum, que la discordance des mesures itinéraires rendait fort incertain. La connaissance du chiffre vrai inscrit sur la Table avait trop d’importance, pour que je ne fusse point très désireux de savoir, d’une manière positive, qui avait raison des anciennes éditions ou de la nouvelle. A ma prière, deux savants de Vienne, MM. les docteurs Butticaz et F. Maassen, ce dernier doyen de l’Université, voulurent bien soumettre à un examen spécial le passage contesté, et le résultat de cette vérification fut que le manuscrit original porte réellement XIIII, comme avaient lu les anciens éditeurs.

J’ai publié par extrait la lettre que m’écrivit à cette occasion l’obligeant docteur Butticaz (1). Elle établit que la leçon, XIIII, ne lui avait pas laissé, non plus qu’à M. Maassen, le plus léger doute :il s’en expliquait même en termes si vifs pour le dernier éditeur, que j’y crus devoir retrancher quelque chose.

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(1) Recherches sur la station gallo-romaine de Mediolanum, dans la cité des Lyonnais. Mémoires de la Diana, t.1er, 1873, p. 95, et tirage à part, 1874, p. 51.

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Ce n’est pas tout. M. Ernest Desjardins, se rectifiant lui-même avec la plus entière bonne foi, reconnut le bien fondé de la critique de MM. Butticaz et Maassen.

En effet, le 15 septembre 1874, ce savant écrivait à M. Champion, libraire à Paris :

M. Vincent Durand, le même qui a fait l’excellente dissertation sur Mediolanum,… dans laquelle il a relevé une erreur commise par moi dans mon édition de la Table, a dû publier une autre étude sur Aquae Segetae… Tâchez de vous la procurer… Au lieu de faire le voyage de Vienne » (ceci est une distraction de M. Desjardins), « Il eût pu s’adresser à moi ; car je possède la photographie premier segment, et cette photographie lui donne complètement raison. »

M. Champion ne sachant comment satisfaire au désir de M. Desjardins, par la bonne raison que ma notice n’avait pas encore paru, prit le parti de s’adresser directement à moi, et c’ est ainsi que la lettre de M. Desjardins est venue entre mes mains. Naturellement, je m’empressai d’offrir à celui-ci un des premiers exemplaires de mon travail. Il m’en accusa réception le 6 juillet 1875, en ajoutant :

« On vous a dit, je crois, que je tenais à votre disposition, quand vous viendrez à Paris, la photographie (grandeur de l’original) du premier segment de la Table de Peutinger. Vous seul, jusqu’à présent, avez redressé une erreur de lecture dans la reproduction que j’en ai faite : l’encre de quelques portions de certaines lettres étant tombée, il faut une très grande attention pour ne pas prendre la moitié d’un X pour un V.J’ai pris bonne note de votre redressement très juste et pour lequel le raisonnement vous a mis sur la voie de la correction. »

On peut donc considérer comme un fait acquis l’existence du chiffre XIIII, en regard de l’étape de Foro Segustavurum à Mediolano, sur l’original de la Table de Peutinger.

M. le baron de Rostaing dit qu’il a été lui-même en correspondance avec M. E. Desjardins au sujet de la carte de Peutinger, et qu’il possède une lettre où ce savant reconnaît l’erreur de lecture par lui commise et, l’exactitude du chiffre rétabli par M. Vîncent Durand.

La séance est levée.

Le Président,

TESTENOIRE-LAFAYETTE.

Le membre faisant fonction de secrétaire,

ELEUTHERE BRASSART.

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