BD, Tome V, La Vierge du Pilier à St-Galmier. – Communication de M. Félix Thiollier., pages 219 à 221, La Diana, 1890.

 

La Vierge du Pilier à St-Galmier. – Communication de M. Félix Thiollier.

 

M. F. Thiolier s’exprime ainsi :

Depuis longtemps nous avions remarqué la belle expression de la tête de Notre-Dame du Pilier, à Saint-Galmier, ainsi appelée parce qu’elle est adossée à l’un des piliers de l’église paroissiale, au-dessus d’un intéressant triptyque.

Une héliogravure publiée dans le Forez reproduit l’ensemble du monument, mais les dimensions de la Vierge y sont trop réduites ; d’autre part, la figure est vue de trop bas, et les parties les plus visibles, c’est-à-dire l’Enfant Jésus et les draperies sont ce qu’il y a de moins remarquable dans la statue, bien que ces dernières contiennent de jolis détails d’ornements. Tout imparfaite qu’elle est, notre reproduction a suffi néanmoins pour attirer l’attention de notre éminent confrère, M. Courajod, conservateur du musée de la Renaissance au Louvre, et il nous a demandé un moulage de la tête.

Grâce à la bienveillance de M. le curé de SaintGalmier, à qui M. Joseph Desjoyaux a présenté notre requête, nous avons pu faire exécuter ce moulage par M. Millefaut, l’habile sculpteur lyonnais, qui a mis son talent à notre disposition avec le plus aimable désintéressement. L’opération n’était pas sans difficultés : la tête est très rapprochée du pilier et il eût été imprudent de déplacer la statue. M. Millefaut a donc été obligé de modeler d’après l’original la partie postérieure de la tête, invisible pour le spectateur. Mais, sauf ce détail, la réussite du moulage est parfaite. On peut en juger par le.deuxième exemplaire qui a été tiré pour le Musée de la Diana et qui est sous les yeux de la Société.

Après avoir reçu l’épreuve destinée au Louvre, M. Courajod nous a adressé la lettre suivante :

Paris, 4 mars 1890.
Mon cher confrère.
Je viens de recevoir le moulage que vous avez bien voulu faire exécuter d’après la tête de la Vierge de Saint-Galmier et je m’empresse de vous adresser mes plus vifs remerciements.
La vue de l’eeuvre n’a pas confirmé, au point de vue de l’attribution à un maitre, l’hypothèse que m’avait inspirée la vue de la photographie ; mais cette sculpture bien française et datant des 15 ou 20 premières années du XVIe siècle est tout à fait charmante et méritait à tous égards l’honneur d’être reproduite en plâtre.
Je communiquerai à mes élèves ce joli morceau, en leur nommant les bienfaiteurs à qui ils le doivent. Veuillez agréer, mon cher confrère, et faire agréer à votre parent M. Desjoyaux que j’ai eu le plaisir de voir à Paris, ainsi qu’à M. Millefaut, l’expression de toute ma gratitude pour ce véritable service que vous m’avez rendu.
Louis COURAJOD.

Nous devons nous incliner devant l’autorité de M. Courajod et nous acceptons respectueusement ses conclusions. Cependant, il nous semble voir une grande analogie entre la statue qui nous occupe et celles de Saint-Marcel d’Urfé et de l’Hôpital-sous-Rochefort, dues selon toute apparence à la munificence du doyen Claude d’Albon, mort en 1509, et cette circonstance nous porterait à croire que la Vierge de Saint-Galmier, ne doit pas être postérieure à cette date.

Il serait intéressant d’avoir sous les yeux et de pouvoir comparer les moulages des trois statues ; ce serait le moyen de déterminer avec plus do certitude leur âge relatif ; d’autre part, M. Courajod recevrait certainement avec plaisir les deux nouveaux moulages ; ils pourraient lui être utiles pour son cours du Louvre et son avis nous serait précieux. Nous comptons donc encore sur M. Millefaut, dont la complaisance est inépuisable. Dans tous les cas nous sommes heureux que ces charmants spécimens de l’art français soient appréciés en haut lieu.

Ainsi que nous l’avons dit, les draperies et l’Enfant Jésus nous paraissent d’une facture très inférieure à celle de la tête de la Vierge. L’Enfant Jésus est d’ailleurs sculpté dans un bloc séparé ; il pourrait être l’oeuvre d’un autre artiste.

On nous dit que cette Vierge était autrefois peinte, comme beaucoup d’autres statues de la même époque; M. Mauvernay, peintre verrier, qui l’a réparée vers 1840 y a remarqué en effet des traces anciennes d’or et de couleur. La statue était à cette époque recouverte d’une couche de peinture épaisse et plus récente, d’environ un centimètre d’épaisseur, sous laquelle le modelé délicat du visage et notamment les yeux avaient presque entièrement disparu.

La Vierge du pilier est l’objet de la vénération des fidéles qui l’invoquent surtout pour obtenir la guérison des enfants infirmes.

Avant 1793, la famille de M. Antoine Point chargée du soin de cette statue, qu’on habillait aux grandes fêtes, la cacha chez un M. Bernard, tonnelier, au milieu d’un amas de tonneaux. On croit qu’antérieurement à la Révolution, elle n’occupait pas la même place et qu’elle a remplacé une Pieta, sur le pilier où on la voit aujourd’hui. Le cul de lampe sur lequel elle repose a été fait par M. Mauvernay vers 1840.

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