BD, Tome 58, Charlotte Bruel, Alain Collet, Quelques illustrations dans les livres du XVe au XVIIe siècle : l’exposition de 1998-1999 du fonds ancien de la bibliothèque de la collégiale de Saint-Bonnet-le-Château, pages 135 à 140, Montbrison, 1999.

 

Après « Choix d’ouvrages manuscrits et imprimés » en 1996-1997 et « Les incunables » en 1997-1998, la Bibliothèque de la Collégiale de Saint-Bonnet-le-Château aujourd’hui rénovée propose aux amoureux des livres et à toutes les personnes intéressées par l’histoire du livre une nouvelle exposition intitulée : « Quelques exemples d’illustrations dans les livres duXVe au XVIIe s. » ( ).
Le fonds de livres et de manuscrits toujours en place dans la sacristie de la collégiale constitue un riche patrimoine écrit à préserver et à valoriser ( ). C’est dans cette perspective qu’il a paru important de montrer dès que possible au plus large public sambonitain, ligérien et bien au-delà, les témoins de l’histoire du livre et du développement de la vie intellectuelle à Saint-Bonnet. La troisième exposition annuelle ici présentée a été élaborée (comme les deux précédentes) pour les journées portes ouvertes du Mois du Patrimoine, les 19 et 20 septembre 1998. L’exposition est toujours visible jusqu’au début du mois de septembre prochain ( ).

Voici le thème de l’exposition à travers quelques points de repères et quelques exemples qui, nous l’espérons, vous donneront à vous aussi l’envie de découvrir ou de redécouvrir une part importante du patrimoine écrit conservé dans la Loire.

Les livres manuscrits : la décoration des manuscrits participe à l’organisation logique des textes comme à leur embellissement. De la « rubrique », titre du chapitre écrit en rouge (du latin ruber= rouge) et de la simple initiale ornée servant de repère, à la miniature en pleine page, véritable tableau, en passant par les bordures et les initiales historiées (présentant des personnages), une grande variété de moyens est à la disposition des copistes et des artistes au service du commanditaire.
Cliché n° 1: Initiale enluminée « S », premier feuillet de l’Officium nove solennitatis corporis Jesu Cristi, ms. in-folio sur parchemin du XVe s.
Les incunabIes (XVe s.): l’illustration des livres imprimés avant 1501 diffère peu, à ses débuts, de celle des manuscrits. Les imprimeurs laissent des emplacements vacants (avec une « lettre d’attente ») pour que rubricateurs et enlumineurs puissent ensuite opérer. L’augmentation constante de la production conduit assez rapidement les imprimeurs à remplacer ces initiales ornées et historiées ainsi que les miniatures par des lettrines et des scènes gravées sur bois. Les premières figures sur bois apparaissent dans les livres de l’imprimeur allemand Albert Pfister à Bamberg vers 1461. Le premier livre illustré français intitulé Le Miroir de la rédemption de l’humain lignage est produit par Martin Husz à Lyon en 1478; il est suivi à Paris par Jean Dupré en 1481. Pour de nombreux incunables néanmoins, la marque d’imprimeur en forme de vignette gravée sur bois placée sur la page de titre ou à la fin du texte (au colophon) constitue la seule illustration du livre (avec les lettrines gravées).
Cliché n° 2 : gravure sur bois extraite de La Nef des Fous [StuItifera navis], de Sebastian Brant, imprimée à Lyon par Jacques Sacon le 28 VI 1488 [en fait 1498], 4°. Comme on peut le voir dès la fin du Moyen Age, la sagesse en matière de livres n’était pas toujours la mieux du monde partagée.
Les livres de la Renaissance (XVIe s.): à partir de 1525/1530 les livres commencent à s’affranchir de leur présentation médiévale. Le texte encore compact est agrémenté de bandeaux, d’encadrements divers gravés sur bois. L’illustration s’inspire à la fois de l’architecture, de l’histoire et des personnages de l’Antiquité gréco-romaine ainsi que de la Bible; elle gagne en finesse en servant des textes précis au contraire de l’époque précédente. C’est avec Le Songe de PoIiphile traduit de l’italien F. Colonna que le livre français atteint son apogée en 1546 ( à Paris, chez Jacques Kerver). L’illustration en taille-douce (sur métal) apparait à Lyon vers la même époque et elle va s’imposer peu à peu en raison de la qualité de ses modelés et de ses nuances dans le noir.
Cliché n° 3 : page de titre avec encadrement gravé sur bois, de l’ouvrage de François Du Puy, général des chartreux originaire de Saint-Bonnet (vers 1448-1521), Cathena aurea super Psalmos, édité à Paris par Pierre Gaudoul en 1530 (2°).

Les livres de la Contre-Réforme et de l’Age classique (fin XVIe, XVIIe s.): l’innovation est la place prise par l’illustration en taille-douce (au burin, à l’eau-forte), tirée à part. Il est fréquent que seule la page de titre soit illustrée: mêlée à la typographie, elle peut être un portrait, un fleuron ou un cartouche représentant une scène tirée de l’ouvrage. Parfois toute la page de titre est gravée de scènes allégoriques où sont représentées des abstractions traduisant les idées maîtresses de l’ouvrage: un seul cuivre sert alors à la gravure du texte et à l’illustration. L’image peut être placée en regard de la page normale du titre ou devant celle-ci; cette planche appelée frontispice représente généralement un portrait. Les autres illustrations, bandeaux, fleurons et culs-de lampe sont encore gravés sur bois.
Cliché n° 4: page de titre gravée sur cuivre de la Biblia sacra imprimée à Paris par Sébatien Huré, Jean Jost et Sébastien Huré fils en 1648, 2°. La page de titre est véritablement la porte du temple (la Bible) donnant l’accès à la parole de Dieu. L’arc brisé au sommet de la composition architecturale baroque suggère cette « aspiration » vers le haut (4).

____________

4 – Quelques références pour en savoir plus: L. Febvre, H. -J. Martin, L’Apparition du livre, Albin Michel, 1971 (Evolution de l’Humanité, coll. de poche). Voir les chapitres sur l’illustration dans les t. l et 2 de: H. – J. Martin, R.Chartier dir. avec la collab. de J. – P. Vivet, Histoire de l’édition française, Promodis, 1983-1986, 4 voL H. – J. Martin, J. Vezin dir., Mise en page et mise en texte du livre manuscrit, Cercle de la Librairie-Promodis, 1990. A. Fidelis Butsch, A. Werner, Handbook of Renaissance Ornament, New York, 1969. [Ouvrage présentant essentiellement des reproductions].

Cliché 1

Cliché N° 2 et cliché 3

Cliché n° 4

X