BD, Tome VI, Ruines antiques découvertes à Saint-Paul d’Uzore. – Communication de M. Alphonse de Saint-Pulgent., pages 250 à 253, La Diana, 1892.
Ruines antiques découvertes à Saint-Paul d’Uzore. – Communication de M. Alphonse de Saint-Pulgent.
M. A. de Saint-Pulgent donne lecture de la note suivante :
En visitant cet hiver l’ancienne église de Saint-Paul d’Uzore, mon attention fut attirée par l’affleurement au niveau du sol et au sud de l’édifice d’une maçonnerie affectant la forme d’un segment de cercle. Notre zélé bibliothécaire, M. Rochigneux, fut frappé comme moi de cette particularité, et, trouvant là une nouvelle occasion de ne ménager ni son temps, ni sa peine, se mit à l’œuvre pour dégager la construction. Après une journée de travail, nous nous trouvions en présence d’une abside en demi-cercle dépassé, d’un petit appareil romain très régulier, et paraissant se relier de chaque côté par sa base à d’autres murs.
Le terrain où nous nous trouvions étant communal, il était impossible de continuer nos recherches sans l’autorisation du maire de Saint-Paul. Je n’ai nul besoin de vous dire que M. de la Plagne, notre aimable collègue, nous a donné toute facilité de poursuivre nos travaux ; et, au bout d’une douzaine de jours, nous avions complètement mis à découvert ces restes de constructions dans l’étendue du terrain de la commune. Elles se prolongent au-delà ; mais les champs voisins étant ensemencés, il ne fallait point songer à demander à leur propriétaire l’autorisation d’y pénétrer.
Telles qu’elles se sont révélées à nous dans la partie explorée, les ruines se développent dans le cimetière et dans l’église abandonnés de Saint-Paul, sur une longueur totale de plus de 22 mètres, parallèlement au flanc de la montagne. Elles consistent, comme on peut en juger par le plan dressé pour nous, par M. Preyssat, avec un soin tout particulier, en deux compartiments rectangulaires A, C, alternant avec deux pièces semi-circulaires B, D, de rayons différents, le tout disposé avec une grande régularité sur une même ligne.
Les murs très bien construits et appareillés sont bâtis complètement en moellons basaltiques provenant du mont d’Uzore, mesurant en moyenne 15 de longueur sur 0 m 075 de hauteur et reliés par des joints saillants d’un bel effet décoratif. Les pierres d’angle toutefois sont presque exclusivement en granit lamellaire tiré des carrières de Maure, et leur longueur est portée à 0 m 22.
L’épaisseur des murs est de 0 m 45 et de 0 m 65.
Dans la pièce rectangulaire C située sous la nef de l’église nous avons trouvé, à près d’un mètre de profondeur, une portion de pavement en opussigninum, de 0 m 06 d’épaisseur. Le bourrelet qui le borde et dont on suit la trace sur toute l’étendue des parois latérales de la pièce indique l’emplacement d’une piscine. Cette aire a été défoncée au moyen-âge pour installer trois sarcophages de pierre. Près de l’angle nord-ouest de la même pièce se trouvent les restes d’un foyer.
D’autres pièces devaient être pavées en mosaïque, car nous en avons découvert quelques cubes dans la pièce B. Une quantité considérable de ces petits matériaux trouvés épars dans une vigne située un peu plus bas provient sans doute des mêmes salles, d’où on les avait extraits et rejetés au loin lors du creusement des fosses à sépultures. C’est en effet à l’établissement d’un cimetière chrétien en cet endroit qu’il faut attribuer l’absence presque totale de débris de l’époque antique au milieu des ruines. A peine avons-nous pu recueillir quelques rares fragments d’amphores, de sérias, de vases samiens.
Quelle pouvait être la destination de l’édifice dont les restes viennent de reparaître au jour ? Il serait, je crois prématuré d’émettre une opinion à cet égard ; en l’état., plusieurs hypothèses peuvent être admises. Il y avait évidemment là un monument privé ou public d’une certaine importance, mais dont nous n’apercevons qu’une partie peut-être minime. Les travaux du canal du Forez, en 1888, ont mis à découvert à quelques mètres seulement en soir et au-dessus de l’emplacement de nos fouilles et sur une longue étendue de terrain, des portions de murailles épaisses, solides et bien appareillées, des indices de voûtes, des vestiges d’un foyer, des cubes de mosaïque, quelques spécimens de marbre statuaire, des quantités considérables de tuiles à rebords; et j’ai tout lieu de croire que ces vestiges ont un rapport direct avec ces substructions. M. Peniguel, d’ailleurs, a fait lever fort exactement tous ces détails et a bien voulu nous en permettre le plan. Quand nous posséderons ce document précieux et que nous aurons, avec votre assentiment, poussé plus loin les fouilles commencées, il sera sans doute possible d’établir une corrélation entre ces divers éléments et d’arriver ainsi à une solution définitive. D’ici là je dois me borner à vous signaler sans commentaires ces découvertes originales.