BD, Tome 63, JEAN-JOSEPH CARRIER DE MONTHIEU, ESQUISSE D’UNE BIOGRAPHIE, Compte rendu par M. Philippe Pouzols-Napoléon, pages 315 à 335, La Diana, 2004.

 

JEAN-JOSEPH CARRIER DE MONTHIEU, ESQUISSE D’UNE BIOGRAPHIE

Communication de Messieurs Jacques Louison,

Compte rendu par M Philippe Pouzols-Napoléon

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Philippe Pouzols-Napoléon et Tugdual de Langlais 1

 

 

 

Personnage très controversé, le marchand d’armes stéphanois Jean-Joseph Carrier de Monthieu, condamné par les historiens foréziens pour ses déboires commerciaux 2 , n’entend pas ici être réhabilité, car il ne semble pas être un ange non plus. Mais il règne aujourd’hui sur ses activités un rare désintérêt.

Personnage peu scrupuleux ? Victime d’une machination de Cour ? Posons les jalons de la connaissance que nous en avons, et laissons aux historiens à venir le soin d’argumenter et de continuer notre étude.

Cet article comprend trois parties, faisant appel à des sources parfois inhabituelles. La première, par M. Philippe Pouzols-Napoléon, est destinée à planter le personnage dans son histoire familiale. La seconde, tentative d’une biographie d’après des sources fiables, due à l’amabilité de Monsieur Tugdual de Langlais. La troisième, par Monsieur Jacques Louison, qui est la présentation de deux pièces majeures : l’ agreement signé le 15 octobre 1776 qui concerne les premières livraisons d’armes aux insurgents d’Amérique.

La famille Carrier alias Carrier de Monthieu,

du Buisson, et du Mollard

 

Voici une maison stéphanoise qui a œuvré dans le commerce des armes et trouve ses origines non pas dans le Velay tout proche mais dans l’ancienne paroisse de Saint-Rambert. La notice qui suit a été rédigée d’après les actes des

1 Héritier de l’armateur nantais Peltier-Dudoyer avec lequel a commercé Jean-Joseph Carrier de Monthieu.

2 Voir Jean-Antoine de La Tour-Varan  : Armorial et généalogies des familles [Etudes historiques sur le Forez], Saint-Etienne, 1854, pages 418 et suivantes. Emile Salomon emboîtera le pas jusqu’à ce que le personnage soit oublié.

notaires de Saint-Etienne 3 , les dossiers bleus de Maître Ferdinand Frecon se trouvant aux archives départe-mentales du Rhône (section ancienne), et les archives de la Diana.

Il faut écarter tous les « Carie » qui paraissent dans la région de Saint-Galmier, patronyme ayant évolué en Caria ou Carriat dans les Monts du lyonnais.

Quoi qu’encore elle sera très incomplète puisque nous ne rattachons pas, et nous le devrions : François Carrier, avocat, inhumé à Saint-Rambert le 22 juin 1681 ; Philibert Carrier, fils de feu Jean 4 et de Jeanne Jolivet, marié par contrat reçu Bessonnet, notaire à Saint-Etienne le 3 septembre 1673 à Claudine Fontanel ; Pierre et Joseph Carrier qui échangent deux vignes au Vernet à Saint-Rambert le 28 mai 1646. Le premier est dit bourgeois et le second marchand 5 . Le même Pierre, vend, avec son épouse, Sibille Matavel, une terre par eux acquise, au capitaine châtelain de la ville de Saint-Rambert, Jean Relogue, suivant acte du 3 août 1623 6 . Jeanne Carrier épouse de Guillaume Gidon, dont Antoine, né le 20 janvier 1637. Catherine Carrier, ursuline à Montbrison en 1665, et Marie Madeleine Angélique qui entre au couvent à Saint-Etienne en 1723.

 

I – Après avoir trouvé plusieurs personnages dans la documentation médiévale, sur la région de Montbrison 7 , Sury-le-Comtal (même jusqu’au 17 e siècle 8 ), et L’Hôpital de Grand 9 , nous trouvons Barthélémy Carrier, de Saint-

3 Surtout doit on dire leur surprenant inventaire dû à un méticuleux secrétaire de la Diana , Monsieur Noël Gardon.

4 C’est lui qui est sans doute déjà mort en 1640 laissant des enfants mineurs, qui engagent par leur tuteur plusieurs procédures contre des habitants de Saint-Rambert pour une captation de revenus d’une succession Rajou – archives Diana 41 F 048.

5 Bibliothèque de la Diana , fonds Bruel, dossier Carrier.

6 Archives Diana 13 F 098.

7 Chartes de Forez n°966 note 16.

8 Archives Diana 13 F 054 et 057 (surnom Carrier pour cette dernière pièce d’un Delaire).

9 Chartes de Forez voir tables des notes sous le tome 20.

Rambert, qui épouse le 20 août 1549 Jeanne, fille de Jean du Rozier, capitaine châtelain de Feurs 10 , le même qui, sans doute, fut député de Forez en 1589 11 . Puis, dans le dernier quart du 16 e siècle Jérôme Carrier, et Gabrielle, sa sœur, épouse de Pierre Cotton, au sujet de la dot de cette dernière à raison d’un contrat de mariage établi par Maître Gonin. Nous n’avons pas plus de précision, le document en question étant incomplet 12 mais une quelconque parenté avec les suivants est probable.

 

II – Baptiste Carrier, notaire royal de Rochetaillée, et La Valette , qui n’est connu que par son testament en date du 8 août 1629 dont l’expédition est conservée à la Diana 13 , cite son frère Claude Carrier (II – ci-dessous), et fait ses héritiers, son épouse Antoinette Moulin, et ses filles, Jeanne, Antoinette, et autre Jeanne.

A la même génération nous trouvons encore, sans prénom, un Carrier, capitaine châtelain de La Fouillouse , consentir le 26 mai 1628 une donation aux Père de Notre-Dame de Grâce, d’une vigne de six journalées, à la condition de célébrer à son intention deux messes les 1 er et 15 de chaque mois 14 . Il peut s’agir de Jean Carrier, receveur des Consignations au pays de Forez, qui vend pour 1500 livres un domaine avec cave, dans le château de la Bouteresse pour payer en partie les 2400 livres de dot d’entrée au couvent des Ursulines de Montbrison, puis de Feurs, de sa fille Antoinette en 1639. De Claudine de Serre il eut une autre fille Gasparde, entrée au couvent des Ursulines de Montbrison en 1641 15 . Ce Jean Carrier est en 1638 associé à André Huguet, dans les fermes du comté de Forez dont les enfants furent, Jérôme né en 1625, et Marguerite épouse de Thomas Thenot, avocat, avocat en parlement à Montbrison (dont elle avait eu un fils encore mineur, Jean), qui, veuve, se remarie à Maître Jean Lassaigne, notaire réservé pour la ville de Montbrison, suivant contrat du 22 août 1655 19 .

 

10 Jouvencel, l’Assemblée de la Noblesse du bailliage de Forez en 1789 , article du Rosier. Le prénom est inconnu.

11 Etienne Fournial : Documents sur les trois états du pays et comté de Forez, volume 2, CEF, 1989.

12 Bibliothèque de la Diana , fonds Bruel, dossier Carrier.

13 Archives Diana 1 E 8 n°014

14 Broutin : Notice historique sur les oratoriens de Notre-Dame de Grâce et les Ermites de Val-Jésus, Lyon, 1871.

15 Broutin : Histoire des couvents de Montbrison , tomes 1, 2 et 3.

19 Archives Diana 1 E 8 n°116.

II – Claude Carrier (né vers 1560), frère du précédent, marchand et bourgeois de Saint-Rambert, qui testa devant Me Jullien, notaire le 6 octobre 1631 16 , épousa de Germaine Sambrisson, fille d’Ennemond, laquelle teste devant Bessonnet, notaire de Saint-Etienne le 4 septembre 1640 17 . La testatrice dispose de biens clos de vignes à Saint-Cosme sur Saint-Rambert, entre le chemin de Saint-Rambert et Notre-Dame de Bonson, quelques journalées de vigne reçues en dot de son père, et des moulins à soie qu’elle a fait bâtir. Ils eurent :

1°) Ennemond, l’aîné, marchand bourgeois de Rouen, mort avant le 26 février 1642, marié par contrat reçu Guereau, notaire du Châtelet à Paris le 3 juillet 1622 à une demoiselle Neyret ;

2°) Ennemond, le jeune, qui suit ;

3°) Jean, qui suivra (IIIbis) ;

4°) Benoîte, épouse de Maître Thomas Thevet, avocat au bailliage de Montbrison ; quoi qu’un autre acte cite une Benoîte fille de Baptiste Carrier (son oncle ci-dessus) épouse de Maître Thomas Thenot, les deux auraient-elles existé ? 18 5°) Jeanne, épouse de Jean Relogue, praticien de Saint-Rambert, dont A) Jean Relogue, marchand de Saint-Rambert, qui épouse suivant contrat reçu Bessonnet, notaire le 15 mai 1664 Benoîte Valoux ;

6°) Claude, maître fileur de soie, bourgeois de Saint-Rambert, qui teste le 17 février 1649 devant Bessonnet, notaire, époux de Catherine Poncetton (inhumée à Saint-Rambert le 11 avril 1672), dont : A) Michel, qui semble être notaire à Saint-Rambert en 1674 20 , marié par contrat reçu Bessonnet le 7 août 1669 Claudine Deville, fille de Pierre, bourgeois de la Basse ville de Saint-Etienne, et d’Anne de La Veuhe 21 , dont : a) Jeanne, mariée par contrat reçu Desvernays, notaire à Saint-Etienne le 6 juin 1693 à Etienne Allemand ; b) Michel Carrier, très âgé en 1751, père de : ba)

16 Cet acte n’est rappelé que dans le testament de son épouse en 1640.

17 Ce testament est l’occasion de rappeler que les archives de notaires de Saint-Etienne étaient principalement conservées à la Diana jusqu’à la convention signée avec les Archives Départementales, le Conseil général, la Ville de Montbrison et la Diana , aux termes de laquelle, un dépôt à La Diana. Mais il n’accueillera plus que les archives des notaires, déjà présentes, concernant les cantons de Saint-Jean-Soleymieux, Montbrison, et en parties de Boën, Saint-Georges-en-Couzan et Noirétable.

18 Bibliothèque de la Diana , fonds Bruel, dossier Carrier.

20 L’Ancien Forez tome IX page 301.

21 Pour la généalogie des La Veuhe se reporter au numéro spécial de Village de Forez paru en 1995.

Carrier, chanoine de Saint-Rambert, qui fait son testament nuncupatif 22 le 11 juin 1731, faisant ses héritiers, son frère, ci-après et ses neveux et nièces ; bb) Michel, bourgeois de Saint-Rambert, époux de Hélène Gentil, dont : bba) Antoine (héritier universel de son oncle), marié par contrat du 15 décembre 1751 23 à Catherine de Cussonnet, fille d’André et d’Antoinette Pellissier, doté de 800 livres par son aïeul Michel Carrier, bbb) Jean-Baptiste, Louis, Benoîte (future épouse Ponceton), Françoise (légataires) ; c) Marguerite, morte avant le 25 octobre 1770, qui a fait pour héritier son frère, Louis Carrier, chanoine, de 200 livres , moins un sol à Benoîte Ravachol 24 ; B) Jeanne, citée en 1649.

III – Ennemond Carrier, le jeune, marchand, bourgeois puis échevin de la ville de Saint-Etienne, marié par contrat reçu Bessonnet le 1 er octobre 1641 à Catherine Praire, fille de Jean, marchand et de Marie Murat. Il est un des fondateurs, sous l’inspiration du Père Guy Colombet en 1683 de la fondation de la Maison de la Charité. Ses enfants ont été :

1°) Pierre Carrier du Buisson, marchand puis conseiller et procureur du roi, marié par contrat reçu de Peyssonneaulx et Desvernays, notaires à Saint-Etienne le 11 juillet 1668 à Marie Germaine Duchon, puis en secondes noces à Delle Deville. Après avoir loué Montsalon à Saint-Genest-Lerpt 25 , Il acquit la propriété du Buisson, et surtout les biens dépendant de la succession de Maître Desvernays, notaire, dont il quittance le paiement le 25 juin 1708 26 soit 3210 livres , et en partie au moyen de deux superbes billets de monnaie de 200 livres chacun. Du premier lit : A) Antoinette, mariée par contrat reçu Pellissier, notaire à Saint-Etienne le 18 juin 1691 à Annet Blachon ; du second lit : B) Ennemond Carrier du Buisson, conseiller au bailliage, marié à Marie Réal, fille de Jean et de Jeanne Bernou ; C) Catherine, épouse de Jean Barthélémy Dutreuil de Rhins ;

2°) Jean Louis, baptisé le 25 janvier 1657, qui suit ;

3°) Etiennette, mariée le 4 septembre 1679 à Saint-Etienne à un noble lyonnais, Antoine Mogniat. Elle meurt le 1 er juillet 1753 âgée de 95 ans ;

4°) Robert, directeur du magasin d’armes de Saint-Etienne, marié avant 1696 à Jacqueline Duplessis fille de Jean et de Marie Titon dont : A) Jean-Baptiste Maximilien Carrier, marchand, bourgeois puis échevin de Saint-Etienne, marié à Saint-Paul-en-Jarez le 25 février 1737 à Marie

22 Archives Diana 2 E 305.

23 Archives Diana 32F I – 078.

24 Archives Diana 32F II – 031

25 Les Châteaux Historiques du Forez par Emile Salomon tome 2 p. 182.

26 Archives Diana 8 F 192.

Antoinette Crozet, fille de Jean, marchand de fer à la fonderie de Grand-Croix, et de Catherine Dubost, dont : a) Françoise Marguerite, née à Saint-Etienne le 17 mars 1739, mariée à Jean Crozet, marchand de fer à Grand-Croix ; b) Jacques Maximilien, marchand de Saint-Etienne, marié à Saint-Etienne le 13 octobre 1785 à Gabrielle Soviche, fille de Benoît, marchand et de Jeanne Berger ;

5°) Marianne Carrier, épouse vers 1695 de Georges Nachard, avocat en parlement.

 

IV – Jean-Louis Carrier, marchand, directeur du magasin royal des armes de Saint-Etienne, ancien échevin perpétuel de la ville, et colonel de la bourgeoisie, le tout entre 1682 et 1722. Il épousa à Saint-Etienne le 15 novembre 1682 Magdeleine Dignaron, fille de feu Fleury, marchand et bourgeois de Saint-Etienne, et de Madeleine de Chazelle dont :

1°) Marguerite mariée le 3 septembre 1715 à André de Brioude, fils d’André, bourgeois de Lyon et de Marguerite Mayoud.

2°) Catherine, mariée à la chapelle de Tardy à Saint-Etienne le 7 avril 1722 à Jean-François Alléon, conseiller du roi ;

3°) Jean, qui suit ;

4°) Pierre, juge des traites et gabelles de Forez, époux d’Antoinette Gendre, fille d’Etienne et de Jeanne Molin, dont :A) Ennemond, marié le 26 janvier 1746 à Françoise Falsan-Durand ;

5°) Maximilien Jean-Baptiste, baptisé à Saint-Etienne le 15 décembre 1701 ;

6°) François, contrôleur du grenier à sel époux de Catherine Nachard, fille de Claude dont : A) Jean-Louis, marié à Catherine Basson, puis à une demoiselle Verdellet ; B) et C) Deux autres enfants dont un prêtre 27 .

7°) Un autre Jean-Louis, mort avant le 12 mai 1778, ancien colonel de la milice bourgeoise, entrepreneur d’armes, époux de Catherine Gervais dont : A) Pierre, cité en 1777 partit pour Paris sous le nom de Carrier du Réal ; B) Charles Carrier de La Thuilerie , né à Saint-Etienne le 15 avril 1744 marié à Saint-Etienne le 12 mai 1778 à Marie Alléon. Il était entrepreneur des armes à feu pour le roi et fut en cette qualité arrêté le 27 octobre 1793 sur l’ordre du révolutionnaire Javogues, et guillotiné à Lyon le 16 mars 1794. Il aurait livré 1000 fusils à Montbrison insurgée avec Lyon contre la République 28 . Les scellés avaient même été apposés sur son domicile à Saint-

27 Dont les prénoms sont ignorés, selon la notice généalogique de la famille Carrier figurant l’Armorial de Jean-Antoine de La Tour-Varan , page 418

28 Tableau général des victimes et martyrs de la révolution en Lyonnais, Forez et Beaujolais (1793-1794), par Antonin Portallier, tomes 1 et 2.

Etienne, rue Valbenoîte ; C) Madeleine, mariée à Fourvière le 5 février 1777 à Louis Joseph Lacour, bourgeois de Lyon.

 

V – Jean Carrier, capitaine-colonel de la milice bourgeoise de Saint-Etienne, marié en premières noces à Saint-Etienne le 4 octobre 1735 à Madeleine Goyet, fille de Jérôme et d’Elisabeth Olivier, puis en secondes noces le 3 septembre 1743 à Magdeleine Bonnand, fille de Joseph et de Marguerite Forette, dont :

Du premier lit :

1°) Etienne ;

2°) Jean-Louis ;

Et du second lit :

3°) Benoîte, mariée à Saint-Etienne le 2 juillet 1781 à Joseph Bied-Charreton ;

4°) Maximilien Jean-Baptiste, baptisé à Saint-Etienne le 26 avril 1752, vicaire du Chambon en 1778 puis de Saint-Just-sur-Loire en 1781 ; Entré au chapitre de Fourvière dont il était le curé, archiprêtre né de Dombes, bachelier de Sorbonne, prieur de Bornel et receveur du clergé de Lyon. Bibliophile et artiste, il marquait ses livres d’un ex libris aux armes de sa famille, où, toutefois, la rose est remplacée par une étoile d’argent brochant sur le chevron.

5°) Marguerite Henriette, mariée à Fourvière le 14 février 1783 à Claude Joseph Berger.

6°) Marie.

 

IIIbis – Jean Carrier, marchand bourgeois de Paris, puis de Saint-Etienne, marié sur le tard par contrat reçu Bessonnet le 22 octobre 1651 à Claudine Bajoulin, fille de Jacques et de Sibille Pellissier, dont :

1°) Jean-Baptiste, baptisé le 25 février 1664, qui suit.

2°) Catherine, baptisée le 18 novembre 1665. C’est peut être cette même Catherine qui est l’épouse de Michel Nachard, conseiller du roi, qui, de concert avec son époux par testament du 10 septembre 1726 reçu Trémollet, notaire à Saint-Etienne, consent diverses fondations pieuses.

 

 

IV – Jean-Baptiste Carrier, marié en premières noces à Marie Deville, fille de Jean suivant contrat reçu Pellissier le 2 mai 1690, puis en secondes noces suivant contrat reçu Pellisier le 24 janvier 1705 à Hélène Tamisier 29 , fille de feu Pierre et de Lucrèce (de) Mauvernay dont :

29 Encore vivante le 10 juin 1741 lors d’une sentence rendue dans une affaire judiciaire – archives Diana 12 n°602.

Du premier lit :

1°) Marie, mariée à Marc Antoine Bertholon ;

2°) (Jean-) Joseph, marié à Madeleine Mayol, adjudicataire des fruits et revenus des terres et seigneuries d’Urfé suivant contrat reçu Merlaton, notaire le 23 août 1742 30 .

3°) Antoine, qui suit.

Du second lit :

4°) Jacques-François, qui suivra (Vbis).

 

V – Antoine Carrier, négociant d’armes à Saint-Etienne appelé « Carrier du Mollard » 31 , ayant épousé Marie Claudine Boyer dont il eut :

1°) Marie Catherine Aglaé ;

2°) Marguerite Julie ;

3°) Etienne, qui suit.

 

VI – Etienne Carrier, négociant d’armes à Saint-Etienne, puis à Paris Rue des Jeuneurs, se maria à Paris le 18 floréal an II à Marie Françoise Elisabeth Huet de Guerville, laquelle, une fois veuve en 1818 épousa le 5 mai 1819 un proche parent de son mari, Marc Antoine Tamisier, dont parmi plusieurs enfants, le cadet :

 

VII – Pierre Alfred Carrier, né en 1801, sous la tutelle de son beau père Marc Antoine Tamisier, qui l’adopte, et changera effectivement son nom de Carrier en celui de Tamisier. Secrétaire d’ambassade à Londres, il sera anobli par le roi d’Angleterre le 26 novembre 1829 32 .

 

Vbis – Jacques François Carrier de Monthieu, marié à Claire Duchon fille de Clément, médecin, et de Marie de Lagrevol dont :

1°) Jean-Joseph, qui suit ;

2°) Hélène, mariée à M. Alexandre Cassier de Bellegarde ;

3°) Marie-Anne ;

4°) Antoine, qui est en 1765 élève au collège de l’Oratoire de Notre-Dame-de-Grâce avec son cousin Maximilien Jean-Baptiste ci-dessus 33 .

30 Bibliothèque de la Diana , fonds Bruel, dossier Carrier.

31 Archives Diana 42 F 185 – pièce dans laquelle il a une procédure contre Antoine Lambert, marchand de Saint-Etienne, au sujet de livraisons de marchandises (1771-1773), mais il ne s’agit pas d’armes.

32 Bibliothèque de la Diana , fonds Bruel, dossier Carrier.

33 Broutin : Notice historique sur les oratoriens de Notre-Dame de Grâce et les Ermites de Val-Jésus, Lyon, 1871.

VI – Jean Joseph Carrier de Monthieu, né vers 1735, qui achète discrètement la terre et le château du Vernay près de Saint-Galmier, le 24 mars 1779 à Louis d’Espinchal 34 , soit 700 hectares au prix de 156.000 livres et qu’il conserva jusqu’à sa faillite le 24 août 1791. L’inventaire de ce domaine peut être reconstitué après coup, lorsque son adjudicataire, M. Thiolière de l’Isle, négociant de Saint-Etienne, se trouve aux prises avec d’énormes difficultés que lui font subir les exploitants des terres au cours des années 1791 à 1793 35 .

On connaît sur lui une considération sur la réforme des armes jugée en Conseil de guerre, libelle d’un anonyme n°88 du catalogue Chaleyer, et un recueil de mémoires par Jean-Joseph Carrier de Monthieu n°1025 du catalogue La Tour-Varan 36 .

Quant au nom de lieu de Monthieu, nous ne savons pas s’il s’agit de celui inclus à présent dans la ville de Saint-Etienne, ou de l’écart se trouvant en pays de Jarez, dans lequel les Carrier ont eu des alliances. Nous ne connaissons même pas sa vie familiale ou sa descendance, s’il a fait souche.

Lui, ou son père, avait modifié leur blasonnement enregistré en 1696 « D’azur au chevron d’or chargé sur la pointe d’une rose de gueules et accompagné de trois losanges » en « Ecartelé d’Or et d’Azur à 4 losanges, l’un en l’autre ». La branche alliée aux Dignaron, avait tout simplement adopté leurs armes.

 

 

La carrière tourmentée de

Jean-Joseph Carrier de Monthieu

34 Devant Maître L’Aulne, notaire à Paris.

35 Archives Diana 42 F 579 pièces 1 à 19.

36 Bibliothèque des Ecrivains Foréziens, par le Chanoine Reure, dans Mémoires et Documents sur le Forez publiés par la Diana , tome 13 pages 96-97. Cet ouvrage se trouve aujourd’hui à la bibliothèque municipale de Saint-Etienne, et porte l’ex-libris de La Tour-Varan .

 

Rappelons nos principales sources pour cette étude 37  :

– « Beaumarchais Correspondances » de Brian MORTON et Donald C. SPINELLI, édité chez A.G. NIZET, 1972 – Tome IV.

– « Gribeauval, Lieutenant général des armées du roi » de Pierre Nardin.

– « Un journaliste contre-révolutionnaire Jean-Gabriel PELTIER » d’Hélène Maspéro-Clerc, édité par les Etudes Robespierristes, 1973.

 

Jean-Joseph Carrier de Monthieu, objet de notre article, est connu pour sa participation dans la compagnie Rodrigue Hortalez de Beaumarchais, par l’association de son nom à celui de Jean Peltier-Dudoyer (ou Pelletier-Dudoyer) dans ses opérations d’armement de navires à Nantes, et aussi pour sa comparution devant un tribunal militaire à Paris en 1773.

Monthieu, à l’origine était le plus important fabricant d’armes aux manufactures de Saint-Etienne 38 , il possédait de plus un entrepôt à Nantes d’où il fournissait en armes les arsenaux de la marine de Lorient et Rochefort, armes qui transitaient par Peltier-Dudoyer. Il expédiait également des armes à partir de Bordeaux et Marseille, il semble qu’il se livrait à des expéditions d’armes à l’étranger, probablement en relation avec la traite des Noirs.

La manufacture de Saint-Etienne était une manufacture « dispersée » ou les commerçants et les armuriers se livraient une concurrence sauvage au détriment de la qualité. La Cour nomme alors Alexis Cassier de Bellegarde pour surveiller la fabrication et réorganiser la manufacture en créant une association des plus importants intervenants, le 5 août 1769, Bellegarde obtient une lettre patente en faveur de Monthieu et le statut de Manufacture Royale.

37 Monsieur de Langlais a disposé sur internet une documentation remarquable, à laquelle on accède en recherchant « Carrier de Monthieu ».

38 Lettres patentes et privilège du 5 août 1769 (L. J. Gras)

Le lancement d’un fusil modèle 1763 et l’encombrement des arsenaux en armes désuètes, dangereuses et disparates, certaines étaient des prises de guerre, incite le Ministre Choiseul à lancer une grande réforme, on désigne le colonel de Bellegarde pour déclasser les armes:

-les armes dont la réparation coûterait 3 Livres et plus,

-les armes les plus récentes dont la réparation coûterait 5 Livres ,

-les fusils de rempart, même neufs, de calibres irréguliers.

A cette occasion Monthieu obtient le droit d’acheter aussi « les effets de nul service » (vieux bronzes, métaux et canons déclassés) à un prix jugé avantageux par les chefs de dépôts. Entre le premier septembre 1767 et le 15 juin 1770 Monthieu achète plus de 100.000 de ces armes à réparer et à revendre à l’export 39 .

En 1769 tout semble sourire à Bellegarde, en mars il est nommé Lieutenant-colonel, en juin il présente son fusil « à dé » et obtient une pension de 600 livres et en juillet il épouse la soeur de Monthieu âgée de 23 ans.

Ce mariage sans autorisation aurait du lui valoir une mutation ou une disgrâce, Choiseul laisse faire, mais le remplacement de celui-ci par Monteyrand, marque le début des ennuis ! Cette réforme a entraîné des inquiétudes et dérangé les habitudes : ne va-t-on pas trop dégarnir les arsenaux ?

Monteyrand fait arrêter les inspections et le 6 octobre 1771 les livraisons à Monthieu, St-Auban est chargé d’enquêter. Bellegarde est accusé d’avoir vidé les entrepôts en outrant les défectuosités et même d’avoir réformé des fusils neufs. Les prix d’estimation des fusils cédés à Monthieu sont jugés trop faibles. Plus grave aux yeux du Conseil, on avait trouvé à Saint-Etienne des fusils neufs 1764, fabriqués avec des canons de fusils réformés !

39 Soumission pour l’arsenal de Rochefort du 14 juillet 1771 (archives de Rochefort). Par la suite, son cousin, Carrier de La Tuilerie , obtiendra la même soumission le 10 octobre 1779 (archives de Rochefort).

Le 7 juin 1773, le Roi constitue un Conseil, le 5 juillet Bellegarde est arrêté, Monthieu est prié de se tenir à la disposition du Conseil.

Bellegarde se défend : il n’a fait qu’obéir aux instructions qu’il avait reçues, Choiseul n’a cessé de le harceler pour qu’il fasse vite, ses rapports ont été signés sans observations par les directeurs régionaux. Quant aux prix achetés par Monthieu, il avait été convenu que ce serait au prix estimés par Bellegarde, et ces estimations remontent pour la plus part avant son mariage, de plus Monthieu a perdu de l’argent dans cette affaire. Bellegarde ne pouvait être rendu coupable des transformations de fusils étant le plus souvent absent de Saint-Etienne.

Mais c’est un procès politique, leur sort est scellé d’avance, Choiseul ne sera pas convoqué, il n’y aura pas de témoins à décharges, ni de confrontations, les membres du Conseil ont été choisis pour leur docilité, il est présidé par le duc de Biron, pair et maréchal de France. On leur refuse un avocat, le procureur est également juge d’instruction ! Finalement on décide de lier le cas de Monthieu, bien que civil, au cas de Bellegarde, le 20 août Monthieu est enfermé aux Invalides.

Malgré tout ils ont leurs partisans, ils se recrutent parmi les adeptes de la réforme de l’artillerie : Gribeauval, Loyauté, Broglie et Richelieu. Les belles-soeurs font faire un mémoire de défense par Linguet. Gribeauval obtient qu’ils reçoivent les conseils d’un avocat pendant 10 jours… Malgré une plaidoirie courageuse de Mille et La Morandière , le 11 octobre 1773, du Puget réclame la peine de mort pour les 2 accusés ! Le Conseil de Guerre condamna les deux hommes:

– Bellegarde à être cassé et à l’emprisonnement pour 20 ans et un jour.

– Monthieu était déclaré incapable de fournir les arsenaux, les 180.000 armes réformées dont il n’avait pas encore pris livraison étaient réintégrées dans les arsenaux, les 10.056 fusils 1766 fournis « comme neufs » par Monthieu seraient brisés, à charge par l’entrepreneur de les remplacer. Il serait maintenu en prison jusqu’à ce qu’il ait rempli cette obligation.

De son coté Monthieu qui n’avait pas reçu de commande depuis 5 mois, ce qui réduisait 1.100 ouvriers à la misère, réclamait 782.000 Livres de dommages !

L’accusation concernant l’achat de vieux métaux par Monthieu n’était pas retenue. Bellegarde fut enfermé à la forteresse lyonnaise de Pierre-Scize, Monthieu à l’Abbaye de St-Germain.

 

Ce procès inique aux accusations incertaines fut rejugé à Nancy le 17 janvier 1778, surtout après la requête présentée par Mesdames de Bellegarde et Carrier de Monthieu auprès de la reine 40 . Ils furent « déchargés de la plainte contre eux » !

40 Dans les mémoires de Mme Campan, édition du Mercure de France, on peut lire page 166 : Elle [la reine Marie-Antoinette] sortait des cabinets du roi et nous dit à M. de Mizery et à moi, en essuyant ses yeux remplis de larmes « vous me voyez pleurer, mais n’en prenez pas d’inquiétude : ce sont les plus douces larmes qu’une femme puisse verser ; elles sont causées par l’impression que m’ont faite la justice et la bonté du roi ; il vient d’accorder à ma demande la révision du procès de MM. De Bellegarde et de Monthieu, victimes de la haines du duc d’Aiguillon contre le duc de Choiseul ». A la page suivante la narratrice rappelle qu’il existait « sans cesse une guerre sourde entre les amis et les partisans de M. de Choiseul, que l’on nommait les Autrichiens, et tout ce qui tenait MM. D’Aiguillon, de Maurepas, de Vergennes, qui, par la même raison, entretenaient le foyer des intrigues existantes à la cour et dans Paris contre la reine. De son côté, Marie-Antoinette soutenait ceux qui pouvaient avoir souffert dans cette rixe politique ; ce fut ce même sentiment qui la décida à demander la révision du procès de MM. De Bellegarde et de Monthieu. Le premier, colonel et inspecteur d’artillerie, le second, propriétaire de forges à Saint-Etienne…Ce qui rendait[leur] cause plus défavorable, c’est que l’officier d’artillerie qui avait fait la réforme, en qualité d’inspecteur, se trouvait, par un mariage clandestin, beau-frère du propriétaire des forges acquéreur des armées réformées. Cependant l’innocence des deux prisonniers fut prouvée ; ils vinrent à Versailles, avec leurs femmes et leurs enfants, se jeter aux pieds de leur bienfaitrice. Cette scène touchante se passa dans la grande galerie, à la sortie de l’appartement de la reine, elle voulut empêcher les femmes de se mettre à genoux, disant « que la justice seule leur avait été rendue ; qu’elle devait en ce moment même être félicitée sur le bonheur le plus réel qui fut attaché à sa position, celui de faire parvenir jusqu’au roi de justes réclamations ».

Bellegarde fut réintégré, on le retrouve colonel commandant le Régiment d’artillerie de Toul, d’après l’Almanach Royal de 1782.

Monthieu fut relâché le 7 octobre 1775 après avoir versé une caution de 250. 000 livres , il reprit ses activités « para militaires » et s’investit de plus en plus dans l’armement naval avec l’armateur nantais Pelletier-Dudoyer, il a même traité des affaires avec les Ministres de la Marine au moment de l’indépendance des Etats-Unis et obtenu de fort belles indemnités d’immobilisation de bateaux pour l’association Beaumarchais, Monthieu et Pelletier-Dudoyer…

Tous les partisans de la nouvelle artillerie se trouvaient atteints par ce procès, blâmes, arrêts et même prison pour Mauroy en raison de son rapport en faveur de Bellegarde.

Gribeauval prolongea son séjour à Bovelles et se fit remplacer dans son service, le 14 janvier 1774 il reçut une lettre de disgrâce de Louis XV ! Deux ans après il était rappelé par le ministère Saint-Germain, obtint en 1776 la grand-croix de St-Louis et le grade de premier inspecteur de l’artillerie. En 1789, par la volonté de Louis XVI, il fut nommé gouverneur de l’arsenal ! C’était l’année de sa mort.

Les avocats furent exilés en province, ils purent revenir rapidement sauf La Morandière. Linguet , après un mois d’exil à Chartres, réintégra son cabinet d’avocat rue Pavée St André des Arts, et Lochard rue de Savoie, comme le mentionne l’Almanach Royal de 1782. Mille rejoignit sa Bourgogne natale sans regret.

La décision du parlement de Nancy déclencha la joie dans le camp Beaumarchais, celui-ci écrit à ce sujet:  » Notre ami Monthieu a gagné son procès tout d’une voix à Nancy. Sa santé se rétablit assez mais sa chère femme a manqué de mourir

cependant elle est hors d’affaires et vient dit-on d’accoucher d’un joli enfant « . Pelletier-Dudoyer écrit le 5 mars 1778 à Francy, alors aux Etats-Unis:  » Tous nos amis se portent bien, M. de Monthieu a gagné son procès par arrêt du Parlement de Nancy « .

Ceci n’est qu’un épisode de la vie mal connue de Monthieu, cette vie reste à écrire, la personnalité de Beaumarchais a occulté celle de ses associés.

Fusil 1763 Léger (1766) Charleville

Reproduction Davide Pedersoli & Cie Via Artgiani 57, I-25063

GARDONE VALTROMPIA (Brescia) Italy

 

C’est Monthieu qui fournit à Rodrigue et Hortalez les armes destinées aux «insurgents» d’Amérique, ces armes prises dans les arsenaux ne pouvaient être les meilleures, surtout après la réforme de Gribeauval qui avait complètement rénové l’armement français. Ceci amènera une vive polémique avec le Congrès dont Francy se fait l’écho dans sa lettre du 9 août 1778 de Williamsbourg.

Plus tard, en 1785, Jean Peltier-Dudoyer et Carrier de Monthieu créèrent pour leurs fils Jean-Gabriel Peltier et Etienne Carrier une banque à Paris, dont l’un des premiers clients était Jean-Joseph Carrier de Monthieu, lui même débiteur de Caron de Beaumarchais … les difficultés de J.-J. Carrier de Monthieu s’ajoutant aux déboires de Baudard de Saint-James entraînaient la suspension des payements en décembre 1787. L ’emprisonnement de Baudard de St-James et sa mort 2 ans après en prison ne changeait rien au cours de l’affaire dont Beaumarchais fut nommé syndic des créanciers. C’était la ruine pour nos deux associés.

Le contrat d’affrètement du 15 octobre 1776

Carrier de Monthieu « Armateur nantais » !

 

Le 7 octobre 1775, Jean Joseph Carrier de Monthieu vient d’être libéré, au moyen d’une caution que ses affaires difficiles ne permettaient peut être pas de payer. Envoyé par le Congrès américain, Silas Deane vient en France obtenir en urgence les secours promis par la France.

C’est là qu’il lie des relations commerciales avec l’armateur nantais Jean Peltier-Dudoyer 41 , acquis à la cause américaine, grâce à Benjamin Franklin, lors de son passage à Nantes en 1776 et qui se trouve convié par Beaumarchais devant la pénurie de bateaux.

Dans la lettre adressée par Beaumarchais à Silas Deane le 14 octobre 1776 42 nous lisons : J’ai l’honneur, Monsieur, de vous envoyer le marché du fret des 1600 tonneaux, ou plus s’il le faut ; aux conditions dont vous êtes convenu avec M. de Monthieu. Je ne vous cache pas que j’ai fait de nouveaux efforts pour être dégagé de payer pour vous d’avance la moitié de ce fret parce que je commence à être un peu gêné… Dès que ce marché sera signé, je ferai filer le plus vite possible non seulement les Ballots de marchandises et armes, ce qui se peut sans bruit, mais encore les pièces d’artillerie sur lesquelles je ne suis pas sans inquiétude à cause de leur forme que rien peut cacher ou dissimuler en route.

41 Cet armateur aura transporté notamment avec le “Bon Papa” et le “Saint-Remy”, près du tiers des émigrés acadiens vers la Louisiane après la déconfiture française au Canada. Mais ces bateaux n’étaient pas partis vide de Nantes, ils emmenaient avec eux plusieurs centaines de français pour la Louisiane que l’on surnommera non les acadiens, mais les Cadiens (d’après un article paru dans Ouest-France, édition Loire-Atlantique du 31 juillet 2004).

42 New-York Historical Society : Silas Deane Papers. Copie à la Yale University , dossiers de Benjamin Franklin, à l’index “Carie de Montieu”.

 

Voici le texte de ce contrat ou Agreement  :

 

…We the subscribers John Joseph de Monthieu and Roderique Hortalez & Co. are agreed with Mr. Silas Deane, Agent of the United Colonies, upon the subsequent arrangements.

That I, de Monthieu, do engage to furnish on account of the thirteen United Colonies of North America, a certain number of vessels to carry arms and merchandize to the burthen of sixteen hundred tons, or as many vessels as are deemed sufficient to transport to some harbor of North America belonging to the thirteen United Colonies, all de ammunition and appurtenances, agreeable to the estimate signed and left in my possession, and which we estimate would require the above mentioned quantity of vessels to carry sixteen hundred tons burthen, which are to be paid for at rate of two hundred livres the ton ; and I will hold said vessels at the disposal of said Messrs. Hortalez & Co. ready to sail at the ports of Havre, Nantes and Marseilles, viz. The vessels which are to carry the articles and passengers mentioned in the afore mentioned list, and are to depart from Havre, as well as these that are go to from Nantes, to be ready in the course of November next, and the others in the course of December following, on condition that one half of the afore mentioned freight of 200 livres per ton, both for the voyage to America and back to France, laden equally on account of the Congress of the thirteen United Colonies and Messrs. Hortalez & Co. aforesaid, who are responsible for them, shall be advanced and paid immediately in money, bills of exchange, or other good merchandize or effects, and the other half the said Messrs. Hortalez & Co. do agree to furnish me with in proportion as the vessels are fitting out, in the same money or other effects as above ; over and above this they are to pay me for the passage of each officer, not belonging to the ship’s crew, the sum of 550 livres tournois, and for every soldier or servant 250 livres , and for every sailor who goes as passenger 150 livres it is expressly covenanted and agreed between us, that all risks of the sea either in said vessels being chased, run on shore or taken, shall be on account of the Congress of the United Colonies and shall be paid agreeably to the estimation which may be made of each of these vessels, agreeably to the bills of sale of each, which I promise to deliver to Messrs. Hortalez & Co. before the departure of any of the said vessels from any of the ports of France mentioned above.

Finally it is agreed that if the Americans detain these vessels longer than two months in their ports, without shipping on board them the returns they are to carry to France, all demurrage, wages or expenses on them from the day of their arrival to that of their departure, these two months excepted, shall be at their charge and paid by them or by Messrs. Hortalez & Co. in our name, as answerable for the Congress of the United Colonies. We accept the above conditions, as far as they respect us, and promise faithfully to fulfil them, and in consequence we have signed this instrument of writing one to the other, at Paris , 15 th October, 1776. 43

 

Signataires : Monthieu, Roderique Hortalez & Co, Silas Deane, “Agent fort the United Colonies of North America .

 

Ce texte nous indique que la liste des armes, marchandises et passagers qui doivent parvenir en urgence aux Colonies Unies d’Amérique du Nord a été arrêtée. Plusieurs bateaux sont nécessaires pour effectuer le transport ; le fret correspondant est estimé à 1600 tonneaux.

L’Angleterre surveille et contrôle le trafic maritime. Aucun armateur ne souhaite prendre des risques disproportionnés en acceptant de transporter les caisses de fusils et l’artillerie « vendus » aux insurgents par la compagnie Hortalez.

Monthieu est sollicité pour contourner la difficulté. Avec de très solides garanties, il accepte de prendre en charge la totalité de ce marché de fret. L’armateur « nantais » s’engage à tenir à la disposition de la compagnie les bateaux, prêts à prendre la mer, aux ports du Havre, Nantes, et Marseille à condition que la moitié du marché de fret soit payée d’avance.

Les prix convenus sont arrêtés sur la base de 200 livres par tonneau, à la fois pour le voyage vers l’Amérique et le retour en France. Le passage de chaque officier n’appartenant pas à l’équipage sera payé 550 livres .

Pour couvrir tous les risques de la mer, les dédommagements s’effectueront sur la base des factures de vente que Monthieu s’engage à remettre à Messieurs Hortalez &

43 New-York Historical Society : Silas Deane Papers. Copie à la Yale University , dossiers de Benjamin Franklin, à l’index “Carie de Montieu”.

Compagnie avant que chaque bateau ne quitte les ports de France susvisés.

 

Ce montage, imaginé par Vergennes, semble avoir bien fonctionné. Les archives américaines nous permettent aujourd’hui de découvrir le rôle décisif joué par Monthieu (voir la correspondance de Benjamin Franklin, par exemple).

Nous pourrions essayer de comprendre pour quelles raisons Vergennes fait préparer, rédiger et traduire un document qui engage Monthieu vis-à-vis du Congrès américain. Ce document signé par Silas Deane était-il vraiment destiné à être accepté par le Congrès ? Silas Deane le conserve dans sa correspondance qui sera publiée à la fin du 19e siècle dans les collections de la New York Historical Society volumes XIX-XXII. La publication en France par Brian N. Morton n’a pas encore soulevé les échos qu’elle mérite (ni aux Etats-Unis d’ailleurs).

 

Avis de recherche :

Notre collègue, le Docteur Claude Chataignon souhaite savoir si une étude sur les différentes communautés de Saint-Joseph notamment dans la Loire a été réalisée et si une liste précise de ses établissements a été dressée.

Prière d’adresser vos renseignements au secrétariat de la Diana

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