BD, Tome LXIV, L’ÉPITAPHE GÉNÉALOGIQUE DE TRISTAN ET CHARLES DE ROSTAING EN L’ÉGLISE SAINT-GERMAIN-L’AUXERROIS (PARIS), Compte rendu par M. Philippe Pouzols-Napoléon, pages 155 à 172, La Diana, 2005.

 

 

L’ÉPITAPHE GÉNÉALOGIQUE DE TRISTAN ET CHARLES DE ROSTAING

EN L’ÉGLISE SAINT-GERMAIN-L’AUXERROIS (PARIS)

Communication de M. Roger Briand

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L’aube du 24 août 1572 s’ouvre à la fête de saint Barthélemy. Comme à l’accoutumée, Marie, l’une des quatre cloches de l’église de Saint-Germain-l’Auxerrois, sonne les matines 1 . C’est le signal convenu pour les noces vermeilles, massacre systématique des huguenots. De nos jours, le sanctuaire de la paroisse royale, ou grande paroisse 2 , l’une des plus anciennes de Paris, vaut surtout pour son ensemble architectural composite. Au roman initial, se sont progressivement ajoutés les évolutions rayonnantes et flamboyantes du gothique, l’italianisme classique de la Renaissance , les répliques stylistiques médiévales du XIXe siècle 3 .

1 A Paris, place du Louvre, 1er arrondissement.

2 Le 8 juin 2004, enfermé dans une urne ovoïde de cristal, le cœur de Louis XVII, fils de Louis XVI, mort dans sa prison du Temple, à Paris, à l’âge de 10 ans a été exposé sur le banc d’œuvre de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois avant d’être transporté dans la crypte de la basilique de Saint-Denis, nécropole des rois de France.

3 A deux reprises l’église sera menacée de destruction : lorsque la Convention fut sur le point d’approuver le plan des Artistes reliant par une longue voie, large et rectiligne, la place de la Concorde (à l’époque dite de la Révolution ) à l’emplacement de la Bastille : quand, en 1857, le ministre Fould propose à Haussmann de faire table rase de l’îlot urbain auquel elle appartient.

Les nombreux visiteurs ne manquent pas d’admirer les deux superbes retables flamands des XVe et XVIe siècles et s’émerveillent de la palette lumineuse des vitraux anciens. L’imagination d’amoureux du passé leur fera guetter l’ombre de la reine Marie de Médicis, ventripotente, tout de noir vêtue, agenouillée en dévotion. Geste plus théâtral, ici même Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, a épousé Armande Béjart. Ce 20 février 1662, lundi gras, les comédiens font relâche, comme prochainement le mariage. Rares sont cependant les touristes à s’attarder devant le curieux monument funéraire retiré dans l’ombre, tout au fond du choeur, malgré l’indication du plan guide : Cénotaphe de Charles et de Tristan de Rostaing.

Issus de riches notaires de Sury-le-Comtal promus par les ducs de Bourbon, les Rostaing prennent rang dans l’aristocratie forézienne à la fin de l’époque médiévale 4 . L’honorable famille se fait connaître par plusieurs dignitaires militaires et religieux (dont cinq prieurs commendataires de Pommiers-en-Forez). Les commémorations du bicentenaire de la Révolution ont opportunément rappelé le rôle éminent joué, en 1789, par Just Antoine Henry Marie Germain, marquis de Rostaing, seigneur de Vauchette, Craintilleux, Saint-Ciprien et autres lieux, chevallier de l’Ordre royal et militaire de saint Louis et de Saincinatus, maréchal des camps et armées du Roy, Grand Bailly et sénéchal d’épéer du pais, comté et ressorts de Forest (1740-1826). Aristocrate atypique pénétré de la philosophie des Lumières, intrépide combattant avec les insurgents américains construisant leur république aux dépens des Anglais (1778-1782), l’ancien premier page de Louis XV (1759), l’époux de Geneviève Charlotte de Mondion (26 avril 1784), est brillamment élu à Montbrison député de l’ordre qui n’est pas le sien : le Tiers Etat (21 mars 1789). Nommé lieutenant général, par ancienneté, le 20 mars 1792, le hobereau forézien se retire

4 Perroy Edouard : Le s familles nobles du Forez au XIIIe siècle – Essais de filiation, tome II, p. 822, Centre d’Études Foréziennes – La Diana , 1977.

sagement dans ses terres où, selon le Moniteur : Il appellera de ses vœux l’auguste famille qu’il n’avait cessé de servir 5 . En confidence, car mieux vaut alors ne pas crier sur les toits ses sentiments monarchistes. Sous la Restauration , aimé de ses compatriotes tel un « père », le marquis est nommé maire et châtelain de Veauchette mais, de temps à autre, il séjourne dans la capitale, rue de Caumartin, près de l’église Saint-Louis-d’Antin (9e arrondissement). À Paris, Just de Rostaing consacre la fin de sa vie à l’édification du monument funéraire de Saint-Germain-l’Auxerrois 6 . Il meurt en 1826, sans postérité.

Le cénotaphe est adossé au mur oblique fermant le côté droit de la chapelle Saint­-Jean-l’Évangéliste, à l’amorce de l’ample courbe du déambulatoire roman. Peint au XIXe siècle dans des tons moyenâgeux, ce vaste oratoire est aménagé sous le clocher (fin XIe siècle). Sur le piédestal parallélépipédique en marbre blanc veiné de gris, rehaussé d’une corniche toscane (hauteur : 1,27 m , largeur : 0,80 m , épaisseur : 0,80 m ) 7 , sont posés deux orants en marbre blanc (hauteur : 1,15 m ) séparés par un chérubin debout (hauteur : 0,70 m ) présentant un livre ouvert de sa main gauche. Les deux personnages sont agenouillés, mains jointes, sur un coussin plus ou moins visible. Celui de gauche (Tristan de Rostaing) porte l’habit militaire, l’autre (Charles de Rostaing) est revêtu d’un grand manteau de cérémonie à col d’hermine et arbore le collier de l’ordre royal du Saint-Esprit.

5 Hoefer (Docteur Jean) : N ouvelle biographie générale. Firmin Didot Frères. Paris. 1863. Quand Louis XVI s’enfuit de Paris, le 20 juin 1791, une délégation d’officier généraux se présente spontanément devant l’assemblée nationale pour jurer fidélité à la Nation et obéissance à l’Assemblée . Le général d’armée Rochambeau est accompagné des lieutenants généraux de Crillon, La Fayette , d’Elbecq et de Rostaing.

6 Latta Claude : Le marquis de Rostaing (1740-1826). communication. Bulletin de la Diana tome XLV, n°2, 2ème trimestre, année 1977.

7 Les mesures ont été prises par nos soins.

Les sculptures sont de bonne facture, mais l’esthétique de l’ensemble dénote une structure hétéroclite d’assemblage.

Une plaque rectangulaire de marbre noir (hauteur : 0,88 m , largeur : 0,63 m ) occupe la partie centrale, à l’avant du socle. Il faut l’approcher au plus près pour décrypter la fine gravure d’une écriture en lettres capitales serrées, devenue pratiquement illisible avec l’effacement de sa dorure initiale. Les caractères ne sont hauts que de quelques millimètres, les majuscules ( 8 mm ) dépassant légèrement les minuscules ( 6 mm ). Contenu dans un ovale ( 0,81 m x 0,61 m ), le texte libère les angles droits où sont logés quatre blasons sommés d’une couronne de marquis. En haut, côté gauche, l’écu de Tristan de Rostaing (D’azur à la roue d’or, surmontée d’un triangle de même) est flanqué des colliers des ordres du roi. Côté droit, celui de Charles de Rostaing est encadré de branches de laurier. En bas, l’écu de Françoise Robertet (D’azur à la bande d’or, chargé d’un demi vol de sable et accompagné de trois étoiles d’argent) figure à gauche, celui d’Anne d’Hurault (D’or à la croix d’azur, cantonné de quatre soleils de gueules) est à droite. Tous deux sont portés par des palmettes.

De part et d’autre de ce panneau sombre, sur le marbre clair du piédestal ressortent les lettres dorées, plus conséquentes, d’une double inscription :

A gauche : La famille de Rostaing avait fondé trois sépultures et fait élever des mausolées à Paris dans les églises des Célestins, des Feuillants et de Saint-Germain-l’Auxerrois. Il ne s’en est retrouvé que les statues de Tristan et Charles, marquis de Rostaing, avec une inscription sur marbre noir provenant des Feuillants et les bustes de Jean et Antoine de Rostaing provenant de Saint-Germain-l’Auxerrois.

A droite : L’an mil huit cent vingt quatre, le marquis de Rostaing lieutenant général des armées du roi, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis et de Cincinnatus les a fait replacer dans cette chapelle à sa famille pour honorer la mémoire de ses ancêtres. De Rostaing de Forest.

Agé de quatre-vingt quatre ans, Just de Rostaing souhaite réunir les quelques vestiges ornementaux subsistant des tombeaux de ses ancêtres. Il en appelle au roi Louis XVIII qui l’y autorise par la décision ministérielle du 14 janvier 1824.

Il en résultera ce bizarre monument dont il nous a paru intéressant de connaître les différentes composantes, à commencer par l’effigie des deux personnages agenouillés. Tristan, marquis de Rostaing, né à Sury-le-Comtal (Loire) le 15 janvier 1513, meurt au château d’Aulnoy, près de Provins (Seine-et-Marne), le 7 mars 1591. Henri III (1551-­1574-1589) a fait chevalier de ses ordres, Saint-Michel et Saint-Esprit (31 décembre 1582), l’ancien page du connétable Anne de Montmorency (1473-1567). Les fiefs de Tristan de Rostaing sont, sinon importants, pour le moins nombreux : seigneur de Vaux-le­-Pénil, de Thieux et de Noisy-le-Sec, baron de Brou 8 , de la Guerche 9 , de Villemomble 10 … Capitaine de cinquante hommes d’armes, il est Grand Maître et général réformateur des Eaux et Forêts de France, premier gentilhomme de la Chambre des rois Henri II, François II et Charles IX, chambellan de Henri III. Surtout, le noble forézien est chevalier d’honneur et l’un des confidents de la reine mère Catherine de Médicis. La cinquantaine venue, Tristan épouse, le 15 juin 1564 à Paris, la jeune Françoise Robertet 11 dont il aura deux fils, Charles qui suit et Antoine, ainsi que deux filles, Anne Éléonore et Marguerite 12 . Son épouse décède au château de Vaux-le-Pénil, près de Melun (Seine-et-Marne), le 10 novembre 1635. Cette seigneurie avait

8 Brou est une localité de Seine-et-Marne, arrondissement de Meaux, canton de Lagny.

9 La Guerche-sur -l’Aubois.

10 Villemomble est un chef-lieu de canton de la Seine-Saint -Denis, arrondissement de Bobigny.

11 Sans doute âgée d’une vingtaine d’années.

12 Anne Eléonore sera l’épouse de René d’Escoubleau, marquis de Sourdis ; Marguerite, dame d’honneur de Catherine de Médicis se marie, en 1586, avec Pierre de Flageac.

été acquise en 1557, moyennant 23 000 livres , son vieux château féodal étant, quelques années plus tard, remplacé par une belle demeure Renaissance 13 . Les deux époux sont inhumés dans l’église paroissiale. Tristan est le fils aîné de Jean, marquis de Rostaing, capitaine châtelain de Sury-le-Comtal, et de Jeanne de la Châtre , tous deux ayant élu sépulture en terre forézienne.

Françoise Robertet est la petite-fille de Florimond Robertet 14 marié à la picarde Michelle Gaillard.

La chronique a retenu que le capitaine Tristan de Rostaing est aux côtés de François de Lorraine, duc de Guise, quand ce dernier, au début du mois de février 1563, met le siège devant Orléans où se sont retranchés l’amiral de Coligny et ses huguenots. Le jeudi 18 à la tombée du jour, l’un d’eux, Jean Poltrot, sire de Méré, attend le duc à un carrefour forestier et lui décharge son arquebuse en pleine poitrine. Guise mourra quelques jours plus tard. La reine Catherine de Médicis venait,

13 La demeure. ruinée. est vendue au XVIIe siècle.

14 Florimond Robertet est né à Montbrison vers 1461 et mort à Blois en 1526. Le jeune conseiller de la chambre des comptes de Forez (tutelle de Jean II, duc de Bourbon) deviendra un important homme d’état en son temps : conseiller, secrétaire des finances en 1495, trésorier de France en 1501. Conseiller écouté de Louis XII, spécialement en matière de politique étrangère, il tiendra la place d’un premier ministre en succédant au cardinal d’Amboise (1510). Confirmé dans ses fonctions par François Ier, il restera jusqu’à sa mort un membre influent du gouvernement royal. De son épouse Michelle Gaillard, de la famille de Longjumeau (Picardie), il eut quatre enfants dont François qui épousera Jacqueline Hurault. Florimond Robertet, son épouse et son fils François, secrétaire des Finances en 1558, sont inhumés dans la chapelle Saint-Honoré de Blois. La boutade de François Ier : Toute plume vole ! à propos de celle figurant sur son blason, vaudra au roi la répartie : Fors une ! qui sera désormais la devise des Robertet. Françoise Robertet est la fille de François Robertet, seul fils de Florimond Robertet lequel, époux de Jacqueline Hurault de Cheverny (Blois, 1530), sera également père de trois filles : Anne, épouse de Claude d’Estampes, Françoise, épouse de Jean Babou et Louise, épouse de François du Fou. La mort de Florimond Robertet inspirera un beau poème au poète Clément Marot.

dit-on, depuis Blois rendre visite au mourant matin et soir. L’assassin sera tenaillé par quatre endroits puis écartelé, le 18 mai suivant.

Charles, marquis de Rostaing, naît le 22 septembre 1573 et meurt le 4 janvier 1660 à Vaux-le-Pénil. Outre les nombreux fiefs familiaux composant son héritage, il accumule biens et honneurs : gouverneur de Melun, conseiller aux « Conseils d’État et privé » du roi Henri IV, maréchal de camp… Le 7 janvier 1612 au château d’Apremont (-la Forêt, Meuse), il épouse sa petite cousine, Anne Hurault de Cheverny, âgée de 35 ans, veuve en premières noces de Gilbert de la Trémoïlle (ou Trémouille) 15 , marquis de Royan, dont elle a eu trois enfants (Philippe, Catherine, Marie). Le couple donnera naissance à deux fils, Louis Henri, comte de la Guerche , titré marquis de Rostaing, mort en 1670 (ou 1679) sans postérité, François, comte de Bury (domaine acheté par Charles en 1663), baron de Brou, gouverneur de Melun, également sans descendance, et à une fille, Marguerite Renée, épouse de Henri de Beaumanoir, marquis de Lavardin. Charles et son épouse sont inhumés dans l’église de Vaux-le-Pénil. Le coeur du marquis sera placé dans l’église de Thieux (Seine-et-Marne).

Les Rostaing possèdent à Paris un hôtel particulier situé rue de Beauvais, proche du palais du Louvre 16 .

De son vivant, le 12 août 1611, Charles de Rostaing acquiert, moyennant mille cinq cents livres, la concession de la chapelle Saint-Charles-Borromée dans l’église des Feuillants du Faubourg Saint-Honoré, à Paris : [ …] ayant de tout temps eu une inclination particulière de servir Dieu en l’église des religieux Feuillans et pour la grande dévotion et piété qu’il

15 Mariage, le 12 septembre 1592.

16 La demeure datait de 1570 mais fut réhabilitée en 1587. Elle sera détruite quand Louis XIV en fait l’acquisition en 1664 pour agrandir le palais du Louvre. La rue de Beauvais sera supprimée en 1854. lors de l’ouverture de la rue de Rivoli ( Berty : Topographie historique du Vieux Paris – région du Louvre, 2°, Tome l, Paris 1885, p. 17-18).

leur a recongnue… Le contrat est enregistré à la date du 28 janvier 1612. Richement décorée d’ornements en marbre rehaussés de dorures, en la mémoire et commémoration des âmes des hauts et puissants seigneurs, la chapelle de Rostaing est remarquée par son caractère ostentatoire.

Commencée en l’an 1600, l ‘église du couvent des Feuillants est achevée, ou presque, en 1608. Elle est dédiée à saint Bernard, le 5 août, par le cardinal de Sourdis (François d’Escoubleau, 1575-1628), archevêque de Bordeaux par la grâce de Gabrielle d’Estrées. Son imposant portail ne sera toutefois terminé qu’en 1624. L ‘abbatiale cistercienne comprenait douze chapelles latérales symétriquement réparties sur chacun des bas-côtés, la quatrième, à droite, étant dédicacée à saint Charles Borromée 17 . Le monastère et l’église des Feuillants sont fermés en 1790, démolis en 1804. Place nette est ainsi faite au tracé des actuelles rues de Rivoli et de Castiglione (1er arrondissement).

Du vivant de Charles de Rostaing, l’avocat poitevin Henry Chesneau de la Guiche édite un curieux ouvrage intitulé : Recueil mémorial des fondations que messire Charles, marquis de Rostaing et Mme Anne Hurault son épouse ont . faictes 18 . Cet album dresse l’inventaire de toutes les inscriptions funéraires figurant dans la chapelle des Feuillants, la plupart étant par ailleurs répertoriées dans L’Épitaphier du Vieux Paris 19 . Le généalogiste Pierre d’Hozier (1592-1660) se montre sceptique quant à leur énoncé, les jugeant prétentieuses à l’excès, parfois volontairement inexactes. Ces sentences nécrologiques sont illustrées par les Trophées médalliques, série d’estampes gravées en 1658 par Israël Sylvestre, sous-titrées : Reliquaire des dévotions qui sont représentées dans les trois chapelles

17 Saint Charles Borromée (1538-1584). archevêque de Milan, neveu du pape Pie IV, fut nommé cardinal à 22 ans et canonisé dès 1610.

18 Variquet Pierre, Paris. 1656 ; transcrites dans le volume 92 du N ouveau d’Hozier- B.n.P.. Cabinet des titres.

19 Raunié E mile : Histoire générale de Paris, tome IV. Imprimerie nationale, Paris. 1894, p. 288-301.

(église des Célestins, église des Feuillants Saint-Honoré, église Saint-Germain-­l’Auxerrois) que messire Charles, marquis et comte de Rostaing, a, fait, faire dans Paris … 20

Les deux orants en marbre du monument de Saint-Germain-l’Auxerrois étaient primitivement installés dans la chapelle Saint-Charles de l’église des Feuillants. L’Épitaphier précise qu’ils étaient séparés par un cartouche aux armes de la famille, timbré de la couronne de marquis et entourés des colliers des ordres du roi. Ils sont accompagnés de deux petits génies tenant, l’un un livre ouvert, l’autre un heaume à lambrequins. De ces deux génies , ou chérubins, il ne subsiste à Saint-Germain-l’Auxerrois que celui au livre ouvert. Chacun des personnages faisait l’objet d’une inscription en écriture dorée, gravée sur une tablette de marbre noir (les repères indiqués sont ceux de l ‘Épitaphier) :

(1869) : Cy dessus est la représentation de haut et puissant seigneur Messire Tristan de Rostaing, Chevalier des Ordres du Roy, décédé le VII mars MDXCI, aagé de LXXVIII ans.

(1870) : Cy dessus est la représentation de haut et puissant seigneur Messire Charles de Rostaing, décédé le IV janvier MDCLX.

Le coeur de Anne Hurault, épouse de Charles de Rostaing, décédée à Paris le 16 avril 1635, à l’âge de cinquante huit ans, fut déposé dans cette même chapelle où était fondée une messe basse, chaque jour à dix heures. Trois messes basses de Requiem commémoraient les jours anniversaires des décès.

L’ Épitaphier 21 signale que la stèle plaquée sur le monument de Saint-Germain­-l’Auxerrois était initialement apposée dans la chapelle Saint-Martin de l’église du couvent des Célestins [Elle était située entre les n° 2 et 8 de l’actuelle rue du Petit-Musc, 4e arrondissement]. Cette mention contredit l’inscription portée sur

20 B.n.F. : coll. Clairambault. 11116. f° 15.

21 Raunié Emile : ibid.. t. II. p. 364-367. rub. 862, Imprimerie nationale. 1893.

le socle du cénotaphe reconstitué par Just de Rostaing, laquelle aurait été dictée par Alexandre Lenoir (1761-­1839), conservateur du dépôt des Petits-Augustins pendant la Révolution. Mieux vaut croire la somme synthétique rigoureuse de Raunié (L ‘Épitaphier). Dans sa hâte à sauvegarder l’essentiel du patrimoine ornemental des monastères parisiens, le valeureux archéologue a pu commettre des erreurs de provenance. En 1796, le dépôt des Petits­-Augustins devient le musée des Monuments . français, à l’origine des collections de sculptures du Louvre.

Les Célestins, branche érémitique des Bénédictins officialisée en 1294 par le pape Célestin V, sont installés à Paris depuis l’an 1352 22 .

Charles V, réputé le Sage, pose solennellement la première pierre de l’église du couvent des Célestins le 26 mai 1365. La chronique du temps vante les splendeurs du sanctuaire consacré, le 15 septembre 1370, à l’ Annonciation de la Vierge Marie. Guillaume de Melun, archevêque de Sens, officie à cette dédicace en présence du roi, de la reine Jeanne de Bourbon (belle-soeur d’Anne Dauphine, comtesse de Forez) et du dauphin, futur Charles VI, le Fol. La reine Jeanne choisira d’y élire son tombeau (1378). Seront de même inhumés dans l’abbatiale Léon de Lusignan, roi d’Arménie (1393), et le duc Louis d’Orléans (1407). Près de l’autel majeur prendront place les coeurs des rois Jean II le Bon, mort prisonnier à Londres (1364), Henri II (1559), François II (1560) et Charles IX (1574), ceux aussi de la reine Catherine de Médicis (1579) et du connétable Anne de Montmorency (1567), protecteur de Claude d’Urfé. Le portail de « cette maison royale » , était encadré par les hautes statues de Charles V et de Jeanne de Bourbon (aujourd’hui au musée du Louvre). Les aristocrates n’étaient pas

22 Isaac Françoise : Les Célestins de Paris, étude historique et archéologique. Positions des thèses de l’Ecole des Chartes. 1965, p. 43-50.

les seuls à choisir les Célestins pour lieu de sépulture la bourgeoisie parisienne de vieille souche y souscrivait également a : Marcel, Bureau, Budé…

Le 16 juillet 1601, la chapelle latérale Saint-Martin, ajout de la fin du XVe siècle, est concédée à Marguerite Hurault, dame de Givry, soeur aînée de Anne, épouse de Charles de Rostaing, pour y faire inhumer les corps desdits . feus sieurs de Givry, père et . fils, et ceux de sa postérité qui auront la dévotion d’y estre inhumez, et y faire toutes épitaphes et les enrichissements que ladite dame advisera, dont elle et les siens disposeront à perpétuité… Il lui en coûte 1 500 écus 23 .

Le 28 avril 1659, moyennant une rente annuelle et perpétuelle de 229 livres , 3 sols, 4 deniers tournois, Charles de Rostaing fait une fondation pour orner et décorer ladite chapelle Saint-Martin à ses frais et dépens et de fonder en icelle chapelle deux messes basses chaque semaine à perpétuité 24 . Le marquis octogénaire entend maintenir dans l’oratoire de sa belle-famille le souvenir de son épouse Anne Hurault (décédée en 1635). Auparavant, en septembre 1653, il a fait apposer en ce même lieu l’épitaphe généalogique figurant de nos jours à Saint-Germain-l’Auxerrois.

Versés dans la corruption, les Célestins de Paris sont supprimés par lettres patentes du roi Louis XVI en date du 5 avril 1778. L ‘église est sécularisée en 1792 et en partie détruite par un incendie en 1795. Ses vestiges, encore visibles en 1847, disparaîtront quand, en 1892, est édifiée l’actuelle caserne des Célestins, quartier de la Garde républicaine à cheval 25 .

Concernant l’environnement ornemental de la stèle des Rostaing en l’église des Célestins, Jean Aymar Piganiol de la

23 Arch. nat. LL. 1505, p. 323-330.

24 Arch. nat. : LL. 1505. p. 455-458.

25 Isaac Françoise : op. cit. p. 43-50.

Force 26 estime que la chapelle Saint-Martin ne contenait rien de curieux autre que les armes de la famille de Rostaing et que, de surcroît, la sculpture était d’un goût très médiocre. Dans son Journal (1793), Alexandre Lenoir est d’un autre avis comme en témoignent ses commentaires [in Description historique et chronologique des monumens de sculpture réunis au musée des Monumens français…, Paris, an X, in 8°] 27 :

205 – Des Célestins : Un petit bas-relief en albâtre blanc, de Germain Pilon, en 1537, qui représente Jean de Rostaing à genoux, en oraison devant son patron qui est au­-dessus d’un autel. Ce morceau tiré de la chapelle des Rostaing était enchâssé dans le mur qui, dans beaucoup d’endroits, offrait des bas-reliefs pris sur pierre, d’un très bon goût et d’une délicatesse étonnante.

206 – De la même chapelle : Deux bustes de femmes de cette famille.

L’une des estampes gravées par Israël Sylvestre montre que la chapelle Saint-Martin des Célestins était effectivement dotée de plusieurs sculptures murales.

En 1796, la stèle généalogique des Rostaing quitte l’église sinistrée des Célestins pour être inventoriée au Musée des Monuments Français où elle est entreposée. Selon une décision ministérielle du 14 janvier 1824, Lenoir remet le 1er février suivant à Just de Rostaing les quelques objets identifiés comme provenant de la célébration nécrologique de ses ancêtres : deux

2 6 Piganiol de la Force Jean Aymar : Description historique de la ville de Paris et de ses environs. nouvelle édition, Les Libraires associés, t. IV, Paris. 1765, p. 200. 225.

27 Le parisien Alexandre Lenoir, passionné de vieilles pierres, conçoit, dès 1790, d’enlever à la vente des domaines nationaux tous les objets d’art arrachés aux édifices religieux. Pour les entreposer, le maire Bailly lui accorde le couvent des Petits Augustins. Non sans mal, il protégera ses « trésors », puisqu’il sera blessé d’un coup de baïonnette en voulant défendre le tombeau de Richelieu dans la chapelle de la Sorbonne.

orants (Tristan et Charles), un chérubin (au livre ouvert), une stèle (épitaphe généalogique) ainsi que deux bustes en marbre blanc, de Jean et d’Antoine de Rostaing, aujourd’hui disparus (l’Épitaphier (ibid.). Pour Piganiol (ibid.) ces derniers proviendraient de l’église des Feuillants. Initialement au nombre de quatre, semblablement drapés à l’antique, ils reposaient sur des piédouches marqués aux armes de la maison de Rostaing. Pour leur commanditaire, Charles de Rostaing, trois de ces bustes représentaient la filiation de ses ancêtres paternels : Jean (aïeul), Antoine (bisaïeul), Gaston (trisaïeul), le quatrième pouvant figurer Charlotte, sa sœur (L’Épitaphier), ou Louis, son fils aîné (Piganiol). Au dépôt des Petits Augustins, ils perdront piédouche et blason, autrement dit leur identité. Anonymes, ils disparaissent des catalogues. Seules les têtes de Jean et Antoine, entreposées au Musée des Monuments Français, sont récupérées par Just de Rostaing. Dans son Journal (ibid., n° 206), Lenoir, les qualifiant de médiocres, déclare, à tort, qu’elles proviennent des Célestins. Peut-être existent-ils toujours ces visages de pierre retournés à l’oubli, rangés dans quelque obscure réserve lapidaire ou exposés dans la demeure d’un riche collectionneur? Le cénotaphe pieusement assemblé par Just de Rostaing fut d’abord placé dans une chapelle latérale de Saint-­Germain-l’Auxerrois, dédiée à l’Annonciation. Elle avait d’ailleurs été jadis concédée à Charles de Rostaing qui, décidément, collectionnait les chapelles funéraires 28 . Ayant souffert lors de l’émeute anticléricale de février 1831 (c’est sans doute alors que les deux bustes disparurent), le monument sera restauré dans les années 1850 29 et transféré tout au fond du choeur, à l’emplacement d’un petit oratoire dédié à sainte Geneviève, où il se trouve encore.

28 La chapelle de l’Annonciation a été concédée à Charles de Rostaing, le 4 juin 1647, par M. Benjamin.

29 L ‘église de Saint-Germain-L’Auxerrois avait aussi subi les dégradations des révolutionnaires de 1848.

Le texte gravé sur la stèle généalogique a été imprimé sous la forme d’un placard in-­4° 29 , lequel a dû servir de modèle au marbrier puisqu’il est formaté en ovale et accompagné des quatre écussons d’angle. Le baron François de Guilhermy 30 l’attribue également à Henry Chesneau qui, de son côté, reconnaissait s’être constitué le commensal, le courtisan, le généalogiste de la maison de Rostaing et qui a célébré la gloire de ses patrons par des écrits extravagants… L’inscription a été publiée dans l’Epitaphier du Vieux Paris 31 . Nous l’avons transcrite en écriture normale (caractères en italiques) sans en modifier les fantaisies orthographiques. Seules quelques virgules ont été ajoutées pour une meilleure lecture. Les signes ( ? ) correspondent aux alinéas de l’ovale. Quelques mentions figurent entre parenthèses (caractères standard) :

Inscription que hault et puissant seigneur messire Charles, marquis et comte de ? Rostaing, a fait poser céans en septembre mil six cens cinquante-trois, aagé de quatre-vingts ans.

A l’honneur et mémoire de la famille des Seigneurs de Rostaing, ? descendus des marquis et comtes de Rostaing, ? d’Allemaigne, de Languedoc et de Guyenne et de leurs ? alliances, nommez dans l’oratoire de cette chapelle, ? ancestres des illustres Gaston, Anthoine et Jean de Rostaing de ? Forests, bisayeul, grand père et père des Seigneurs Jacques de Rostaing, abbé ? de Bonnefondz près Thoulouse, de Pébrac en Auvergne et de la ? Magdelaine de Chasteaudun, évesque de Mandes (Mende) et depuis évesque ? du Puys, où il est inhumé, et de messire Tristan, marquis de Rostaing ? Nay 1513, oncle des Rostaingz, seigneurs de Vauchette, dudit pays de Forests, et qui ? en sa jeunesse fût nourry page d’Anne duc de Montmorency, conestable de France, ? puis fait premier gentilhomme de la Chambre de Charles, duc d’Orléans III, fils du Roy ? Françoy I, et ensuitte fait premier gentilhomme de la Chambre des Roys Henry II, François II, ? et de Charles IX, desquels les coeurs sont céans, chevalier des deux Ordres du Roy, capitaine ? de cinquante hommes d’armes des ordonnances de Sa Majesté, gouverneur particulier de la ville et chasteau ? de Melun et de

29 B.n.F., coll. Clairambault. 1116. f° 35.

30 Guilhermy (Baron François de) : Inscriptions de la France du Ve au XVIIIe siècle . Ancien diocèse de Paris , t. I. 1873, p. 473.

31 Raunié Emile : ibid. t. II. p. 364-367. rub. 862, Imprimerie nationale. 1893. Paris.

Fontainebleau, chevalier d’honneur de la Reyne Catherine de Médicis, régente ? en France, qui füt nommé par le Roy Henry III à la dignité de mareschal de France, par brevet du mois de may 1589, signé Ruzé, sieur de Beaulieu, secrétaire d ‘Estat, tant pour ses grands mérites, sages ? conseils et vray fidélité envers les quatre Roys prédécesseurs de Sa Majesté, que pour avoir soustenu ? très vigoureusement pour son service, en 1588, et en ladite année 1589, deux sièges dans Melun, mais cedit ? brevet ne put estre suivy du serment, à cause de la mort inopinée du Roy, arrivée à Sainct Cloud, au mois ? d ‘aoust de ladite année 1589, et au mois de mars ensuivant 1590, le Roy Henry IV revenant de gaigner la bataille d’Ivry, il l’envoya, en qualité de l ‘ un ses lieutenants généraux, rassiéger ledit Melun qu’il reprit el y, fût remis ? avec éloge pour l’année suivante 1591, il mourut au chasteau ? d Aunoy, près Provins, aagé de de 78 ans ; son corps repose dans le choeur de l’église de sa terre de Vaux-Apenil, où ? l’on voit comme il a servy six Roys de France et, fait autant d’actions généreuses qu’aucun capitaine de son ? temps ; il avoit espousé, en 1544, madame Françoise Robertet, cousine germaine de madame d’Estrée, mère ? de madame la duchesse de Beaufort et du premier mareschal de La Chastre , qui, fut aussi dame d’honneur ? de ladite Reyne Catherine et qui estoit, fille de François Robertet, bailly dit Palais, et de Jacqueline Hurault, dame de Maincy et de Villemenon en Brie, enterrée à Sainct Nicolas des Champs, cousine germaine de messire Phi ? lippes Hurault, comte de Cheverny, chancelier de France et de l’ordre du Sainct Esprit, duquel seigneur Phi ? lippes Hurault et de madame Anne de Thou, son espouse, sont venus Henry Hurault, leur fils aisné, comte de ‘heverny, Philippes Hurault, évesque de Chartres, Louys Hurault, comte de Limours, Marguerite Hurault, qui es ? pousa en premières nopces Guy de Laval, marquis de Nesle, en secondes nopces Anne d’Anglure, marquis de ? Givry, et en troisiesmes nopces Arnault d’Angereux, comte de Maillé et de Beaupuy. Anne Hurault, qui espousa ? en premières nopces Gilbert de la Trémoille , marquis de Royan, et en secondes nopces Charles, marquis et comte ? de Rostaing, et Catherine Hurault qui espousa en premières nopces Virginal d’Escoubleau, marquis d’Alluye, et ? en secondes nopces Anthoine, marquis d ‘Aumont ; et est à noter que messire Estienne Poucher, évesque de Bayonne et ? depuis archevesque de Tours, grand oncle maternel desdits Huraults, tondu, l’an 1348, le couvent des pères Célestins, qui est en la ? terre d ‘Éclimont, en Beauce, appartenant ausdits Huraults, comtes de Cheverny ; laquelle Marguerite Hurault est aus ? sy fondatrice d’une messe perpétuelle en cette chapelle Sainct Martin, où elle est inhumée ; et se remarquera ? derechef que ledit seigneur Tristan de Rostaing eut, dès l’an 1573, de ladite Françoise Robertet, petite fille de Florimond Robertet, comte de Bury et seul secrétaire d ‘Estat en France, décédé en 1532, ledit seigneur Charles de ? Rostaing, duquel le Roy Charles IX fut parrain, et qui à l’aage de dix sept ans agist courageusement avec ses beaux ? frères, les seigneurs de Flageach et de Sourdis d’Escoubleau, aux deux sièges de Melun où il . fut . fort blessé, ? qui a tousjours continué de servir avec valeur et prudence en de grandes et honorables charges les , Roys Henry IV et Louys XIII, et qui espousa au chasteau d’Apremont, en bas Poictou, en 1612, ladite dame Anne ? Hurault, qui estoit veufve dudit seigneur marquis de Royan, Marguerite Renée de Rostaing, marquise de Lavardin et François de Rostaing, comte de Bury ; pour toutes ? lesquelles considérations il a, du reigne du Roy Louis XIV, en 1653, fait orner cette dite chapelle avec ledit oratoire, ? le passage d’icelle et les dehors qui sont à la veue de ce grand autel, après avoir placé et . fait bastir le ? couvent des Pères Recollets de son faubourg Sainct Liesne de Melun, fait . faire et establir sa sépulture ? en sa chapelle des Feuillans rue Veuve Sainct Honoré, où il a fondé des messes et services perpétuels et ? fait la mesme chose en ses terres du comté de Bury Rostaing, en Blaisois, à Brou, au Perche Gouet, à Thieux ? près Dampmartin, audit Vaux-Apenil lez Melun, aux Carmes de ladite ville, et acquis et, fait enrichir la chapelle de ? l’ Annonciation Nostre Dame de Sainct Germain l’ Auxerrois, paroisse de son hostel de Rostaing, rite de ? Beauvais, joignant le Louvre, le tout à l’intention des desdits seigneurs et dame cy dessus et encore en ? commémoration de mesdames ses deux sceurs, à sçavoir Marguerite de Rostaing, qui espousa en premières nop ? ces Hubert de Levis, baron de Couzan, cousin germain des seigneurs ducs de Ventadour et en secon ? des nopces Philhert des Serpans, baron de Goudras, neveu du seigneur de La Guiche , grand maistre de l’ar ? tillerie de France, dont elle a eu Françoise des Serpans, comtesse de Rochebonne, mère de plusieurs ? enfans, dont il y en a deux qui sont comte de Lion, et en troisiesmes nopces Pierre, comte de Flageach, ? dont elle a eu Louyse de Flageach, marquise d’Allaigre, mère des marquis et comtes d Allaigre d’Auvergne ? et de la marquise d’Urfé, Margueritte de Flageach, qui espousa en premières nopces Christophe, ? comte d’Apcher, et en secondes nopces messire Emanuel de Crussol, duc d’Uzets, premier pair de ? France et chevalier d’honneur de la Reyne  ; duquel mariage est issu Armand de Crussol, comte d’Uzets, ? filleul du cardinal de Richelieu, et ont fait une double alliance, sçavoir du comte de Crussol, ? fils aisné dudit seigneur duc, avec la fille unique dudit comte d’Apcher, et Anne de Flageach, ? femme en premières nopces du comte de Sainct Auban, et en secondes nopces femme du comte ? de Serre ; et Anne de Rostaing, seconde soeur dudit Charles de Rostaing, qui espousa en ? premières nopces René d’Escoubleau, marquis de Sourdis, dont elle a eu Tristan, ? René, Jacques, Pierre, Anthoine, Georges et Charlotte d’Escoubleau, marquise de Querman, lequel ? Pierre d’Escoubleau, marquis de Surieux, son troisiesme fils, espousa ? en premières nopces Anthoinette de Bretaigne, soeur du comte de Vertus D’Avaugour, ? dont est venu une fille qui est mariée avec le, fils aisné du marquis de ? Gordes de Simiennes, chevalier du Sainct Esprit et capitaine des gardes ? du corps du feu Roy, et en secondes nopces une fille de la maison ? de Cremoz, sœur du comte de Sainct Trivier d’Antragues, dudit ? Forest, y avant encores beaucoup d’autres personnes de ? grande condition de ce royaume qui sont pro ? ches parens desdits seigneurs et dames de Rostaing, Robertet et Hurault. ? Priez pour eux.

 

Les généalogistes vérifieront l’exactitude des diverses filiations aristocratiques, flatteuses, mentionnées sur cette stèle. Plusieurs d’entre elles concernent le Forez. En se référant aux fonds d’archives, les historiens attesteront que Tristan de Rostaing n’a pas obtenu le brevet de maréchal qu’aurait signé, en mai 1589, le secrétaire d’État Ruzé, sieur de Beaulieu. Le postulant n’a-t-il pas eu le temps de prêter le serment requis avant l’assassinat du roi Henri III, le 1er août suivant, par le moine dominicain Jacques Clément ? Surtout, il ne disposait plus du précieux appui de la reine Catherine de Médicis, décédée le 5 janvier précédent. A l’incertitude d’une fin de règne et de dynastie s’ajoutaient d’implacables luttes religieuses. Henri IV n’a pas réparé cet oubli. Est-ce parce qu’en juin de cette même année 1589 le lieutenant général a, sans coup férir, abandonné Melun (Seine-et-Marne) à la Sainte Ligue ? Cinq jours de siège seront nécessaires aux troupes du Béarnais pour reprendre la ville, près d’un an plus tard, le 11 avril 1590 ? La mort de Tristan de Rostaing, en mars de l’année suivante, mettra un terme à l’espoir du maréchalat.

L’émeute anticléricale du 13 février 1831 32 ruine l’église Saint-Germain-l’Auxerrois. L’édifice aurait sans doute été démoli s’il n’avait servi de mairie d’arrondissement. De 1838 à 1855, l ‘obstiné Viollet-le-Duc fait admettre aux édiles la restauration du sanctuaire dans le style médiéval à la mode. Les

32 Après un service funèbre commémorant l’assassinat du duc de Berry, deuxième fils de l’ex-roi Charles X, et exposant ostensiblement le portrait du duc de Chambord, les orléanistes et la foule ameutée envahissent et saccagent l’édifice, organisant une mascarade avec les ornements sacerdotaux.

architectes Lassus et Baltard juxtaposeront cinq siècles de styles architecturaux : roman, gothique rayonnant et flamboyant, renaissance. Cette sauvegarde in extremis doit surtout qu’entre 1608 et 1806, l ‘église de Saint-Germain-­l’Auxerrois, promue le Saint-Denis du génie et du talent, ait accueilli les dépouilles de grands artistes logés dans le Louvre voisin : les poètes Jodelle et Malherbe ; les peintres Coypel, Restout, Boucher, Chardin ; les sculpteurs Sarrazin, Coysevox, Desjardins, Coustou, père et fils a ; les architectes Lemercier, Le Vau, d’Orbay, Robert de Cotte, Gabriel…, et aussi le médecin et journaliste Théophraste Renaudot 33 .

Chaque 21 janvier, une messe est dite en cette église à la mémoire du roi Louis XVI. Avant qu’il ne soit déposé dans la crypte de Saint-Denis, le 8 juin 2004, le coeur de Louis XVII a été exposé sur le majestueux banc d’oeuvre du temps de Louis XIV (1684).

Au bas de l’une des planches du Recueil d’Henry Chesneau de la Guische (ibid., f° 28) est inscrit :

Grand Rostaing, ma muse et moy

Parlerons toujours de toy.

 

Autres références bibliographiques et documentaires concernant Tristan de Rostaing :

Castelnau (Michel de) : Mémoires, édit. par Michaud et Poujoulat, Paris, 1838.

Guibourg Pierre, dit le Père Anselme : Histoire généalogique et chronologique de la Maison de France et des grands-officiers de la Couronne , Paris, 1675, tome VIII, p. 940.

 

33 Un petit tertre sur le côté nord de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois a été dallé et marqué d’une croix. Là, ont été réunis les ossements de ces célébrités du monde de l’art.

 

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