BD, Tome LXIV, LES CAHIERS DE DOLEANCES DU TIERS ETAT DE LA VILLE DE SAINT-ETIENNE, Communication de Monsieur Michel Bourlier, pages 300 à 342, La Diana, 2005.

 

 

LES CAHIERS DE DOLEANCES DU TIERS ETAT DE LA VILLE DE SAINT-ETIENNE (suite)

3 mars 1789

 

Communication de Monsieur Michel Bourlier

____________

 

 

Doron, épouse le 28 septembre 1756, à la Grande Eglise , Jeanne Berger/Valencier d’une vieille dynastie coutelière. De l’union de Barthélemy Soviche et de Jeanne Berger est née une fille Jeanne-Marie Soviche qui va capter l’amour interdit de Jacques Maximilien Carrier, fils de défunt Jean Maximilien Carrier, entrepreneur des armes pour le roi en sa manufacture, et de vivante Antoinette Crozet .

Cette famille Soviche, d’un rayonnement qui dépasse la cité, sent décidément un peu le soufre ! La propre tante côté paternel de Barthélemy Soviche, Laurence Soviche, a épousé Antoine Béraud. Elle se trouve ainsi porteuse d’une nichée aussi intelligente qu’agitée avec Marcelin Béraud, le futur conventionnel qui votera la mort du roi, avec Louise Béraud épouse du talentueux maître de forges Etienne Bessy de Saint-Romain-en-Jarez, et avec Catherine Béraud qui épouse le 29 février 1764 à Notre Dame de Saint-Etienne le député des maîtres tanneurs à l’assemblée municipale : Etienne Meyrieux (bénédiction par un nommé Béraud curé de La Tour-en -Jarez). Toujours le même essaim foisonnant d’idées ! Soviche sera membre du Tribunal du District en 1794.

Voilà bien toute une appartenance significative des idées nouvelles.

 

b) Bruno Penel, marchand armurier de Saint-Etienne, fils des défunts François et Marguerite Coignet, se marie âgé de 32 ans, le 14 novembre 1780 (Grande Eglise Saint-Etienne), avec Gabrielle Richardier, fille des défunts Jean Richardier et Demoiselle Delhorme de la paroisse de Boisset-les-Montrond. Gabrielle Richardier demeure à Saint-­Etienne depuis plus de

Il faudra trois sommations respectueuses les 3,5 et 8/10, auprès de Madame Carrier mère, pour que l’union d’un homme de 28 ans et d’une jeune fille de 22 ans soit bénie à Notre-Dame le 13 octobre 1785 ! Pour une famille d’Entrepreneur du Roi en sa Manufacture c’est un comble, une révolution ! …Saint-Etienne a compté ses Montaigu et ses Capulet! Saint-Etienne A.M. série E –

trois ans, elle est autorisée par son frère Guy Richardier, marchand épicier de cette ville, député de sa corporation. De cette union naît une fille Jeanne-­Marie Penel, mariée à 17 ans à François Vocançon marchand armurier, Grande rue à Saint-­Etienne, le 10 frimaire an VIII. Appartenance significative des idées nouvelles là aussi. Voici les forces vives des lendemains de 1789. Bruno Penel sera pénalisé de 2.000 francs au titre de la loi sur le maximum.

 

7) Maîtres-limeurs :

a) Jean-Antoine Brazier est fils d’Antoine serrurier et de Marie Blanc, marié le 29 septembre 1756 à Notre-Dame à Jeanne Vincent, fille de Jacques coutelier et de Marie Giraud. b) Jean Baptiste Chauve, fils de tailleur de limes épouse le 14 février 1764 à Notre Dame à Saint-Etienne, Françoise Brunon fille de Jean Baptiste forgeur et de défunte Antoinette Berardier. Par sa mère, il est cousin germain de toute la lignée des Montagny graveurs qui vont s’illustrer dans les sceaux officiels des prochaines structures administratives qui vont succéder à la Monarchie. Son propre beau-frère Christophe Brunon a épousé Madeleine Soviche. Milieu acquis une fois encore, par ses alliances, aux idées nouvelles.

 

8) Maîtres couteliers :

a) Claude Peyret, fils de Jacques Peyret et Jeanne Baudin/Allard de Monteille, épouse le 5 juillet 1787, à Notre Dame, Marie Faudrin à 22 ans, avec la bénédiction de l’oncle curé de l’épousée. Elle est la fille de Clément Faudrin, le futur député de sa corporation en 1789 et de Benoîte Thomas.

b) Jean-Antoine Bizaillon, maître et marchand coutelier à Saint-Etienne, est fils d’Antoine Bizaillon de même profession et de Jeanne Bodet. Il se marie à 23 ans à Saint-Etienne, le 10 mai 1763 avec Jeanne-Marie Bourrin, veuve de Marcelin Charentu aussi marchand coutelier . Avec ce patronyme se profile la société de demain. Tout alors va terriblement vite … ! Deux des frères cadets de Jean-Antoine, Auguste et Barthélemy Bizaillon, compteront dans les brillants officiers de l’armée impériale. Une de leurs sœurs, Catherine Bizaillon, a épousé le 7 février 1761 le célèbre graveur Clément Montagny. Ce dernier va mettre son burin renommé au service des gloires des régimes nouveaux. Milieu très stéphanois, s’il en est, Jean-Antoine Bizaillon pour se distinguer (seulement ?) du reste de son encombrante parentèle (manie partagée par tout ce milieu aisé), se fait appeler parfois Bizaillon des Ormes. Il réglera volontairement 48 livres pour la taxe pour l’humanité souffrante.

 

9) Maîtres ou marchands fourbisseurs : Barthélemy Chaleyer. Fils d’un armurier François Chaleyer et de Marguerite Garde, Barthélemy Chalayer, frère d’Henri chanoine de Fourvière, s’est marié deux fois. En premier lieu il épouse, armurier, le 6 juin 1746 Catherine Canut, fille du marchand calandreur Jean-Pierre Canut et de Delle Claudine Berthon (le ruban et l’acier). Devenu veuf Barthélemy Chalayer épouse en secondes noces le 27 juin 1752 , marchand fourbisseur cette fois, sur la paroisse de Notre Dame de Saint-Etienne, Marguerite Tezenas fille de Jacques armurier et d’Andrée Gourgouliat.

Naissent de cette seconde union de nombreux enfants dont : un fils Armand Chalayer bénédictin, Catherine épouse du marchand en quincaille Antoine Pascal, une autre fille Catherine mariée à Antoine Chappelon/Bizaillon, Jean-François Chaleyer marié à Jeanne Chappelon/Bizaillon, Jean-

La dynastie Bizaillon fonde sous l’Empire une très grosse affaire de commande sur catalogue (déjà !) et d’exportation de quincaille au début XIXe siècle. Le musée des A. M. V. S. E conserve un catalogue magnifiquement illustré de la production diversifiée de cette maison – C’est bien avant le célèbre « Chasseur français » d’Etienne Mimard ! – Une de ces branches se trouve à l’origine de la fabrique de rubans Neyret, le ruban et l’acier !

Louis Chalayer enfin négociant, marié le 18 juin 1792 à Notre Dame de Saint-Etienne à Jeanne-Marie Delaroa, fille de Jean-Louis et de Catherine Peyron. Ces derniers seront les parents de Madame Gérentet, du bibliophile bien connu Barthélemy Chaleyer, et de Madame Gilbert Perrin (descendance Gillet de Lyon). Jeanne-Marie Delaroa épouse de Jean-Louis Chalayer se trouve être la propre nièce côté maternel par alliance du conventionnel Marcelin Béraud, époux en premières noces le 8 février 1775 à Saint-Victor sur Loire de Marie Thérèse Delaroa-Martignat. Une fois encore idées nouvelles partagées dans un milieu familial cultivé ouvert extra-muros !

 

10) Menuisiers et caissiers : Jacques Moulin, menuisier, fils de Jean du même état et de Claudine Julienne Dumarest, a épousé Paule Rochard, fille de défunt Pierre et Alexie Vincent, en la Grande Eglise le 6 janvier 1776, en présence des négociants Just et Sébastien Fromage . Est-ce Jacques Moulin qui, député du Forez à la Convention , vote la mort du roi avec sursis ? Contrairement à son collègue Marcellin Béraud, la mémoire stéphanoise est très légère quant à son souvenir. Fonctions nationales donc !

 

11) Aubergistes et cabaretiers : Martin Clemençon cabaretier à Saint-Etienne, sur la paroisse de Notre Dame est né vers 1718, il a épousé à 28 ans Catherine Plaid, le 12 février 1756 à Notre Dame, plus âgée que lui et veuve. Sa vie est un roman : modeste jardinier au service du couvent des Pères Minimes de Saint-Etienne lors de son mariage, il se trouve à 70 ans député des marchands de vins et des cabaretiers en 1789. C ‘est l’époque où les cabarets connaissent l’énorme activité liée aux

Ph. Testenoire Lafayette : Histoire de Saint-Etienne. – ibid – La transcription de la Diana ne donne bien sûr pas les signatures des auteurs des doléances, ce qui aiderait à leur identification – même cas pour les Thiolliere – voir infra –

réunions et discussions politiques des partis et clubs. L’encaissement des droits d’entrée des vins dans la ville constituent une des recettes les plus sûres du marquisat de Saint-Priest et Saint-Etienne. Clemençon va gagner beaucoup d’argent. Son fils Jean Baptiste Clemençon épouse le 27 juillet 1779 Lucrèce Jalabert fille de Christophe armurier. Cette alliance l’apparente au clan des grands armuriers Jalabert-Lamotte. C’est un homme d’un âge. Il assiste à la transformation d’une société. Il a su y faire sa place ! On continuera à boire. Pas de changement notoire ! Martin Clemençon donnera 120 livres pour la taxe révolutionnaire pour l’humanité souffrante .

 

12) Maîtres boulangers : Mathieu Jurie ou Jury. Député de sa corporation en 1789, Mathieu Jury est un des deux députés des corporations stéphanoises a déclaré ne savoir signer. Fils de Jean Jury déjà boulanger à Saint­-Etienne et de Catherine Ferriol, il a épousé le 6 février 1762 à 26 ans Jeanne Coudert, 16 ans, fille des défunts Barthélemy Coudert et Anne Ardaillon .

Le couple fait une aimable fortune, ayant deux valets en sa boutique. Jeanne acquiert sur ses fonds personnels le domaine du Buisson à Saint-Victor sur Loire ( 6 000 livres pour 25 hectares de bonnes terres … avec des fendues ouvertes sur le charbon). Lui, acquiert un immeuble rue Roannelle, puis d’autres terres pour compléter le domaine familial de Saint-Victor. Il se voit cité en justice pour avoir omis de payer à l’Abbaye de Conques en Rouergue, titulaire du Prieuré de Sainte-Foy du Chatelet, le droit de laod sur les terrains qu’il a acquis dans son mandement à Saint-Victor-sur-Loire. Deux seulement de leurs huit enfants arrivent à l’âge adulte.

Devet : Saint-Etienne sous la Terreur – Une taxe révolutionnaire pour l’humanité souffrante – Imp. Chevalier 1884.­

Par sa mère (Anne Ardaillon) elle se trouve la petite-fille du sculpteur montbrisonnais Benoît Dufour et l’arrière petite-fille de Claude Desiré ! Les pains de formes extraordinaires l’ont peut-être hantée ?

La loi Le Chapelier ayant supprimé les corporations, Mathieu Jury pieusement enferme dans les archives familiales les titres de rentes au denier vingt contractées auprès du trésor royal pour 900 livres le 7 août 1771, par les corporations des boulangers et bouchers de Saint-Etienne en Forez, sur l’injonction du Ministre des finances Bertin .

Leur fils Claude Jury, négociant en quincaillerie, épousera en 1811 Mariette Peumartin-Frappa. Elle est la propre nièce de Noël Marie Misson, Président du district (premier conseil général). Elle gardait une peur affreuse des colères incontrôlables de cet oncle grand jacobin  !

Mathieu Jury comptait dans son proche cousinage, le moins obscur Jean-François Jurie des Camiers, auteur

C’était, mine de rien, l’annonce du « tic » de sa descendance en 1917 avec les emprunts russes, et plus tard, avec ceux de Manufrance ou d’Euro-Tunnel ! Aujourd’hui c’est simplifié le porteur n’a plus les titres.

Jeanne Coudert, ébranlée par la mort de deux de ses filles à 24 et 22 ans, semble avoir fortement orienté sa foi du côté du Jansénisme local …. La descendance de son fils Claude Jury attendra deux générations, vivant sur la fortune acquise, pour se lancer dans les affaires nouvelles ….

Il avait fallu calmer les fureurs du tribun en coiffant d’un bonnet phrygien l’enfant ­Jésus de cire dans la ravissante petite boîte à Jésus familiale, aux trois côtés vitrés. Jésus était bien le premier pour l’égalité et le partage, avait argué la belle-soeur du tribun. L’enfant, elle, n’avait pas compris. Comble d’horreur, la maison de l’oncle Noir avait été privée de son couvert, le toit jeté à la rue, pour avoir abrité un jacobin notoire ! Sa descendance a fait brûler l’enfant Jésus de ses prières enfantines. Ses bras de cire en étaient tombés et la couleur de son bonnet phrygien avait viré, m’a assuré l’iconoclaste, alors maire de Saint-Victor (oncle maternel de l’auteur et dernier des Jury). La boîte à Jésus, partie à Aix-en-Provence, sert de vitrine à une des arrière-arrière petites-filles …

Ce sont là les ancêtres maternels directs de l’auteur. Son grand père Charles Jury, d’abord premier employé de la grande maison Astic, vendit le domaine du Buisson pour créer sa fabrique de rubans, 4 rue de la République , en 1900 à la raison sociale Javelle et Jury. C’est avec émotion que, dans les papiers de famille qui lui furent confiés en 1960 par un oncle maire de Saint-Victor, il mit la main sur les titres de rentes au denier vingt des corporations des boulangers et bouchers de Saint-Etienne.

d’adresses au roi des Français pour sauver la monarchie parlementaire et d’une prétention d’influences extra-muros .

 

13) Maîtres tailleurs (d’habits) :

a) Blaise Piat, maître tailleur d’habits à Saint-Etienne fils de Jean de la même profession demeurant à Saint-Genest-Lerpt et d’Antoinette Dorelle, épouse à Saint-­Etienne, le 10 janvier 1775 (C.M. Mey-A.D.L.), Anne Chorier fille de feu Fleury cordonnier, en présence de Barthélemy Noir et de Dominique Catelan. Ces témoins nous apportent un éclairage précieux sur les idées de notre tailleur. Barthélemy Noir, aubergiste place Marquise, est le beau-frère d’un Noël Marie Misson conducteur des grands chemins, futur Président du District (ancêtre du Conseil Général) et premier architecte voyer de la ville de Saint-Etienne. Barthélemy Noir a épousé le 6 juin 1769, en la Grande Eglise , Gabrielle Peumartin fille de Jean­-Pierre aubergiste et de Marie Bourgaud/Béraud. Noël Marie Misson (décédé le 21 septembre 1820 à Saint-Etienne) épouse le 4 février 1783 Marie Anne Peumartin fille des mêmes. C’est lui qui fit abattre les croix de la ville et briser le tympan de la Grande Eglise transformée en forge pour la défense de la Nation !

b) Jean Grangier, l’autre député des tailleurs d’habits, fils de Jérôme et Marcelline Tardy eut un entourage plus terne. Il épouse le 14 mai 1782 Françoise Ponvianne fille de Pierre boulanger dans le quartier de la Grande Eglise.

 

14) Architectes et bâtiers : Pierre Antoine Delgabio (ou Del Gabbio) est dit le jeune (né le 2 avril 1748 à Rivas – mort le 21 juin 1823 Saint-Etienne) parce que fils du frère cadet de

Jurie-Descamiers – Remplacement général des droits onéreux, présenté à l’Auguste Assemblée Nationale par M. Jurie Descamiers, près le Mont Pilat, l’un des commettants au pays de Forez – S.I (Vienne – 1790) – Catalogue de la Bibliothèque de Louis Chalayer N° 1858. Partisan d’un monarque de droit divin dont les lois ramèneraient à Dieu !

Michel Ange, autre Pierre-Antoine Delgabio (1714-1779) dit l ‘ancien et de Maria Scetti. Pierre Antoine Delgabio fait la longue carrière que l’on sait, presque entièrement stéphanoise, attiré dès 1771 par son oncle Michel-Ange. Les commandes qu’il ne manque pas d’exécuter pour une clientèle huppée restent peu répertoriées avec la dispersion des archives privées de ce milieu argenté dont il cultive très assiduement les relations. Ces attaches, la compromission sérieuse de son frère Jacques Antoine dans l’insurrection royaliste et les troupes de Precy lui valent d’être suspecté et incarcéré.

Sa carrière d’architecte voyer de la ville en 1790 (remise en état de la Place du Peuple – alors Pré de la Foire ) connaît l’éclipse spectaculaire que lui doit sa fâcheuse compromission dans l’insurrection lyonnaise aux côtés du maire Desverney. Elle renaît à titre provisoire de 1806 à 1808. Notre architecte bénéficie dès lors d’une réputation établie. Son aisance s’affiche avec une fortune assise en moins de trois décennies. Sa fortune lui permet de compter dans les 100 contribuables les plus imposés de la ville en 1803. Pour un immigré, il a fait fort ! C’est une insertion parfaitement réussie. Derrière lui il y a la forêt des maçons italiens qui ( la Savoie est si près) poursuivent la tradition de Forez-Terre d’Italie affichée par Claude d’Urfé en 1540  !

Pierre Antoine a épousé sur la paroisse de Notre-Dame le 29 juillet 1777, Madeleine Despinasse, originaire de

A.D.L. série Q. 7948 6 le 15/12/1823- Il laisse à son décès deux immeubles à Saint-Etienne sis l’un rue Neuve et l’autre rue de Bourbon. Les a-t-il construits ? (Communication Melle J. Laurent A. G. L.) ; Madeleine meurt d’ailleurs rue Saint­-Louis, ancienne rue de Bourbon le 6/12/1829 –( fonds révolutionnaire – Q 218- A.D.L)-scellés posés à son domicile 13 rue Neuve le 4 pluviôse an II (actuelle rue José Frappa) – Les seuls meubles notables consistent en une armoire et une commode à trois tiroirs – Dans un cabinet au rez-de-chaussée « les débris de fer des croix qui ont été abattues » – Elargissement du 5 germinal an II et levée des scellés – A.D.L. série Q document 218.

Chirolles en Rigny (Saône et Loire) pensionnaire des Religieuses dominicaines de l’ordre de Sainte-Catherine de Sienne (nièce du curé de Rigny)… Influence très large en Forez.

Trois de leurs filles se marient : Marie épouse Jacques Laurent avoué à Marvejols (Lozère), Aimée l’entrepreneur d’origine italienne Jean Malbert, Marguerite le 6 mai 1818 Gaspard Luc Moret, voyageur négociant, fils de Pierre Moret ci-devant noble et avocat au parlement, juge de la Baronnie de Confolens-Lignon et de Delle Gabrielle Brunand fille de Jean-Baptiste bourgeois de Saint-Etienne et de Dame Antoinette David.

 

15) Maîtres perruquiers:

a) Jean-Baptiste Blanc maître perruquier à Saint-Etienne, fils d’Etienne et de Jeanne Virat, vient du faubourg de Cabessut, à Cahors – Il épouse à Saint-Etienne, le 12 septembre 1754 à la Grande Eglise , Magdeleine Ferriol fille de Georges faiseur de boucles (de chaussures !) et de défunte Marguerite Boisset. Il vient d’ailleurs. Il doit sentir l’air du large et réagir au climat ambiant !

b) Louis Ménard épouse (remise paroisse Notre Dame 7 août 1773) une lyonnaise de la paroisse Saint-Paul, Demoiselle Denise Pauffin.

 

16) Maréchal-ferrant: Antoine Gonyn (ou Gonin). En 2005, cette représentation professionnelle pourrait prêter à rire, à la rangée d’écoliers qui oublieraient l’énorme trafic voiturier qui se fait autour d’une cité déjà capitale industrielle. A l’écart des grandes voies de communications, la ville compte ici par centaines, voituriers par voies de terre, voituriers par voies d’eau. On trouve essentiellement ces derniers à Saint-Rambert, à Roanne, à Condrieu ou Serrières. Il n’y a pas de déplacement sans chevaux … D’où cette prolifération d’écuries étonnante à Saint-Etienne même, sur le plan du marquisat de Saint-Etienne et Saint-Priest entre 1767 et 1773. Aucun règlement d’urbanisme n’existe alors dans la cité des affaires, au risque d’entraîner la pollution mortelle des puits voisins de ces installations rustiques pour le moins…. Curieusement, cet unique représentant des maréchaux ferrant se devait à lui seul d’exprimer les préoccupations du cavalier mondain et celles plus profondes de l’utilisateur du seul moyen de locomotion alors connu (d’où la vieille expression d’unité de cheval moteur ou cheval vapeur comique pour l’écolier d’aujourd’hui !). Les rues étroites de la vieille cité industrielle retentissent alors non seulement du vacarme incessant des ateliers de forges et des métiers de rubanerie à navette battante, mais encore du fracas de ces énormes convois d’attelage qui se dirigent en fonction des lettres de voitures vers les centres d’exportation les plus rapprochés. Une seule règle impérieuse : échapper aux péages multiples et le plus souvent seigneuriaux.

On touche là le dernier signe de l’aveuglement fatal à la royauté. Détail insigne pour l’historien local, il vise notre chère province. Le roi instaure à Versailles en décembre 1788 en seigneurie avec justice haute basse et moyenne la structure administrative qui devait assumer l’achèvement du canal reliant la Loire au Rhône. C’était là annoncer : péages, pouvoirs de police, contrôles, relevés d’infractions et sanctions ! Tout un programme contraire à l’esprit des stéphanois. Ils connaissent déjà la lourdeur du système avec la concession de la Loire de Saint-­Rambert à Roanne. La Révolution remettra donc la réalisation du « canal des deux mers » au placard. Quand, les réticences du négoce local éteintes, le projet est repris, les maîtres de forges, venus d’ailleurs, ont importé chez nous le chemin de fer venu d’Angleterre. Un siècle de progrès s’est ainsi perdu dans l’inconscience.

Né de l’union de Bernard Gonin du même état à Saint-Chamond et de Claire Rechagnieux, Antoine Gonin maréchal ferrant épouse, le 13 janvier 1783 à Notre Dame à Saint-Etienne, Pierrette Ancelin issue d’une vieille dynastie des métiers du fer, fille de Jean-Baptiste tailleur de limes. Le curateur de l’époux est Antoine Gonin marchand de Saint-Symphorien sur Coise (autre centre économique important à l’époque) .

De par son appartenance, Jean-Baptiste Gonin doit être considéré comme bien informé du problème mais sûrement marqué des réticences du temps sur le bouleversement des habitudes et les aléas d’un métier ancestral qui ne veut ni se transformer ni disparaître.

 

17) Député des teinturiers : Claude Trouillet. Député de la corporation des mouliniers (de soies), chapeliers et teinturiers en 1789. Son père a versé 150 livres de contribution à la taxe pour l’humanité souffrante.

 

18) Maîtres tanneurs et cordonniers : Etienne Meyrieux maître tanneur épouse, le 29 février 1764 à Notre Dame de Saint-Etienne, Catherine Béraud fille d’Antoine et Laurence Soviche. Nous revoici une fois encore plongés dans le système interplanétaire des constellations Soviche-Béraud-Brunon. Elles éclairent le crépuscule rempli de promesses du siècle des Lumières !

 

19) Député des bouchers : Antoine Bontemps. C’est là une des familles les plus anciennes de la boucherie stéphanoise . Jean-Baptiste Galley mentionne ces installations de boucherie concédées à l’Hôtel-Dieu de Saint-­Etienne par lettres patentes du roi soleil, comme un lieu repoussant de saletés et de grossièretés … De solides fortunes s’y étaient amoncelées sur

Cette famille Gonin de Saint-Symphorien figure dans les ancêtres directs des Merlier/Rostain, c’est à dire de la souche de bien des familles de la grande rubanerie locale – les Merlier, les Neyret, les Valancogne etc … Le très regretté Emile Le Vrat leur descendant, dans une publication familiale, s’étonnait de la couleur un peu violine des ancêtres Rostain/Gonin.

A.D.L. fonds 29 J – dossier 511 – le 28 juin 1672 prix de boutiques et adjudication. ­Antoine Bontemps, Jean Bontemps l’aîné, Jean le jeune, Pierre Bontemps – L’auteur de ces lignes descend de Jean Bontemps l’aîné.

un des commerces les plus sales et les plus vieux du monde. Les plus astucieux avaient su faire précéder l’abattage, d’élevages dans de vastes domaines ruraux des campagnes d’alentour (au Devey notamment, maintenant zone industrielle). Les bêtes engraissaient dans de verts pâturages en attendant l’inflation du steack ! Les Bontemps comptent des alliances avec les Pupil, les Tremollet (notaires), les Trablayne (notaires), les Bardonanche.

C’était curieusement, dans l’éternel paradoxe stéphanois, un milieu furieusement attaché par tradition à l’attitude du Parlement. Le 30 janvier 1666 la Cour des Grands Jours siégeant à Clermont, avait proprement débouté de son droit de carnage le marquis de Saint-Priest et de Saint-Etienne. Cette victoire remportée haut la main par le conseiller au Parlement des Dombes Claude Julien/Chomat avait été ressentie comme une conquête éclatante des libertés pour la ville toute entière sur les vieilles arcanes de la féodalité …. Redevances et droits de Polices échappent définitivement au Seigneur au profit d’une institution sociale déjà. Elle se voit promue maître d’ouvrage de la nouvelle boucherie, avec répartition des boutiques et adjudication ! Le clan des Bontemps se compte quatre fois en 1672 dans le lot des 24 premiers adjudicataires.

Cette conquête sur la liberté du commerce est bien sûr dirigée par des recteurs issus de la tradition du grand négoce stéphanois. Le pouvoir ne fait que changer de mains. Victoire et illusion, toujours un même débat ?

L’histoire stéphanoise s’inscrit rarement dans des pages glorieuses qui alors ne sont pas comprises. C’est peut-être le pourquoi de cette multiplication d’ouvrages parus et à paraître sur Saint-Etienne. Ces réticences, cette pugnacité un peu sordide n’aident pas à la grandeur mémorisée de notre département tout entier. « Espérance » reste bien la devise du Forez.

Il y a deux Antoine Bontemps bouchers en 1789… les deux frères et qui plus est, fils d’autre Antoine boucher à la Grenette et d’Elisabeth Reocreux : Antoine uni le 15 février 1752 à sa cousine Benoîte Bontemps, Antoine marié le 18 août 1789 à Marcelline Massardier. Ils maniaient les mêmes tranchoirs et les mêmes idées…

CONCLUSION

 

Nous devons conclure modestement que si des hommes de bonne volonté il y en a partout, ce sont par contre toujours les mêmes et ce, depuis que l’humanité connaît un soupçon d’organisation. Le phénomène persiste. Prendre des initiatives, les formuler, c’est aussi un acte de courage.

L’auteur constate que la fonction de député de corporation (au plan civil comme au plan religieux – connue alors pour les boulangers sous le titre de Confrérie de Saint­-Honoré – avec ses fêtes carillonnées …) est aussi synonyme d’un véritable accompagnement social, professionnel, comme éducatif vis à vis des familles du métier. Il fallait s’occuper des successions difficiles, des veuves et des orphelins, des cessions de fonds, sans compter la délivrance des « maîtrises » des compagnons et apprentis. C’est aussi très tangible dans la seule corporation bien cernable des couteliers stéphanois, seule corporation à avoir obéi à des règles précises, mais parce qu’elle venait d’ailleurs, transférée du Chambon à Saint Etienne en 1604 par la force des grossistes en tout genre !

Il faut avouer, pour le cas de Saint-Etienne, que la multiplication des alliances entre les décideurs d’une population de 28 000 âmes rend cette perception d’autant plus caricaturale que Saint-Etienne est déjà une vraie et grande ville manufacturière. Mais, après tout, cette notion de minorité pensante a-t-elle tellement changé au cours des siècles ? Vox populi vox dei. Le XIXe siècle stéphanois affirmera, au travers des révolutions administratives et industrielles, cette tradition avec une audace tranquille…

Au plan positif, on voit bien sûr aussi des tribus porteuses de gènes qui les appellent à prendre une responsabilité publique. Ces efforts ne sont pas forcément connus ni récompensés. Les mandats quels qu’il soient demandent la fidélité à un idéal, une grande probité, un engagement. Un idéal ne saurait se passer de sacrifices ! Il lui faut ses martyrs. Un faux pas peut être fatal.

En lisant ces lignes, le lecteur aura découvert la grandeur des uns, la faiblesse des autres, les fondements d’une réflexion libérale à la naissance des libertés nouvelles. Par le rayonnement extra-muros de certains clans du futur chef-lieu du département, il a vu se dessiner son identité bien particulière avec ses faiblesses, sa grandeur, ses éternelles réticences, ses renoncements.

Nous n’en sommes qu’aux premiers balbutiements d’une démocratie naissante. Avant d’aboutir au principe du suffrage universel, il faudra encore beaucoup de brassage d’idées, de bravoures, de sueurs, de sang, de larmes et de révolutions industrielles, sociales, culturelles et administratives.

Un monde va disparaître. Les décrets d’application de la loi Le Chapelier les 2 et 17 mars 1791 suppriment toutes ces antiques corporations, elles ont fait leur temps   !

Leur promoteur sera lui-même guillotiné à Paris en 1794.

L’on peut encore voir naître entre ces lignes la société française du siècle à venir. Cet héritage va même perdurer bien au delà, dans la façon de vivre, de voir les choses et de les gérer. Cette « culture » ne sera pas celle de demain. D’autres horizons se sont ouverts au delà des révolutions ….

Le propre de l’humanité serait-il d’être toujours en mouvement, pour l’idéal d’un devenir meilleur ? C’est au fond notre commune « Espérance » !

X