BD, Tome II, Statue et inscription à Essertines-en-Châtelneuf, pages 122 à 125, La Diana, 1882.

 

Statue et inscription à Essertines-en-Châtelneuf.

M. l’abbé Relave, au nom de M. l’abbé Virieux et au sien, donne les détails suivants sur le saint Pierre ou le saint Pierrot d’Essertines-en-Châtelneuf.

Ce saint est une statue en pierre grossière du pays, qu’on trouve à un quart de lieue au-delà du village, dans un hameau appelé les Fau. Elle représente un homme à longs cheveux, vêtu d’une veste de paysan, qui semble avoir la main droite dans sa poche, et tenir de la gauche, à la hauteur de la hanche et appuyé au corps, une sorte de vase cylindrique ; elle mesure 90 centimètres et se termine un peu au-dessus du genou. Elle est très grossièrement. façonnée ; le dos n’est pas travaillé; l’écartement des bras, pas plus que celui des jambes, n’est évidé ; on distingue dans les orbites des yeux des traces de plomb et de fer.

La situation en est assez caractéristique. Elle est comme plantée à la pointe que forme un champ en s’avançant entre deux chemins, en face d’un troisième ; les chemins étant creux, elle se dresse au sommet du tertre, dans l’attitude rigide des oeuvres rudimentaires, et domine tout un entassement de grosses pierres qui ne sont peut-être là que pour soutenir la terre, mais qui pourraient appartenir à quelque vieux monument d’une superstition locale. Elle est orientée au levant et regarde la plaine. Bien qu’évidemment profane, elle est à demi vénérée par les habitants du pays, qui du reste ne savent absolument rien sur son compte, sinon qu’ils l’ont toujours vue là.

Ce qu’ils n’avaient pas toujours vu, c’est une inscription que les eaux ont mise à nu il y a quelques mois, et qui se trouve gravée sur une des pierres dont il vient d’être question. La pierre, assez massive, est encore enfoncée dans la terre: sa partie supérieure a été seule dénudée par les eaux ; elle présente une face rectangulaire de 0m 45 de largeur sur 0m 20 à 0m 25 de hauteur qui paraît avoir été légèrement aplanie pour recevoir l’inscription.

Cette inscription (dont nous donnons ici la reproduction) se continuait-elle ? La grossièreté du grain de la pierre et ses profondes rugosités ne permettent guère de s’en rendre compte. Le 1er caractère est certainement identique au 6e, le 3e au 5e, et le 4e au dernier. Le point placé après les cinq premiers est douteux ; l’appendice du Q pourrait bien aussi n’être qu’une rugosité de la pierre et il faudrait alors lire un O ; l’A est admirablement formé. Au-dessus de l’inscription, une entaille assez profonde a été faite dans l’épaisseur de la pierre comme pour recevoir une tige de fer.

Faut-il voir dans cette figure bizarre et dans l’inscription qui semble l’accompagner une œuvre très-ancienne et d’une valeur archéologique quelconque, ou simplement l’ouvrage relativement moderne de quelque artiste-amateur de la localité ? Aux doctes à en décider.